« Nous, citoyennes et citoyens marocains, déclarons que nous sommes hors la loi. Nous violons des lois injustes, obsolètes, qui n’ont plus lieu d’être. Nous avons eu des relations sexuelles hors mariage. Nous avons subi, pratiqué ou été complices d’un avortement. Nous avons appris à feindre, à composer, à faire semblant. Pour combien de temps encore ? ». Les premières lignes du manifeste rédigé par la romancière Leïla Slimani et la réalisatrice Sonia Terrab sont poignantes. Ce texte très fort, publié dans « Le Monde », a déjà été signé par plus de 490 Marocaines et Marocains, qui se déclarent « hors la loi » en référence à la législation de leur pays. L’objectif ? Obtenir plus de libertés en matière de sexualité et de droit à l’avortement. Le journaliste franco-marocain Ali Baddou a lui aussi signé cette tribune.

Dénoncer l’hypocrisie des autorités marocaines

Leïla Slimani avait déjà dénoncé le manque de liberté sexuelle au Maroc dans son livre « Sexe et mensonges », paru en 2017. On peut y découvrir des témoignages de femmes marocaines qui se confient sur leur sexualité et qui dénoncent l’hypocrisie du gouvernement marocain sur ce sujet. Les relations sexuelles hors mariage sont en effet interdites par l’article 490 du code pénal marocain, qui punit « d'emprisonnement d'un mois à un an toutes personnes de sexe différent qui, n'étant pas unies par les liens du mariage, ont entre elles des relations sexuelles ». L’avortement est aussi interdit, sauf quand la vie de la mère est en danger. L’article 453 du code pénal prévoit jusqu’à deux ans de prison pour une femme qui se fait avorter, et jusqu’à cinq ans de prison pour une personne pratiquant un avortement sur autrui, rappelle « Libération ».

« Aujourd’hui, je ne veux plus avoir honte. Moi qui aime, avorte, ai des relations sexuelles sans être mariée. Moi qui me cache. Moi qui risque le déshonneur, l’infamie, la prison. »

Les signataires de cette tribune demandent un changement rapide de législation, qui ne correspond pas à la réalité de la population marocaine. « Aujourd’hui, je ne veux plus avoir honte. Moi qui aime, avorte, ai des relations sexuelles sans être mariée. Moi qui me cache. Moi qui risque le déshonneur, l’infamie, la prison », peut-on lire dans le manifeste. Il est aussi écrit qu’en 2018, 3 048 personnes ont été incarcérées pour adultère au Maroc. C’est ce que risque la journaliste marocaine Hajar Raissouni, arrêtée il y a maintenant trois semaines pour « relations sexuelles hors mariage » et « avortement illégal ». Alors que le procureur vient de reporter son jugement à fin septembre, elle est incarcérée et risque jusqu’à deux ans de prison. On espère que le manifeste des « hors la loi » aura un impact sur le procès de cette jeune femme de 28 ans. Mais aussi pour toutes les personnes au Maroc qui ne peuvent vivre leur sexualité comme ils l’entendent.