Dépêche

Les droits des employés gays et trangenres devant la Cour suprême américaine

Washington (AFP) - Un employeur a-t-il le droit de licencier un salarié parce qu'il est homosexuel ou transgenre? La Cour suprême des Etats-Unis étudie mardi cette question qui, dans un contexte très politisé, divise profondément la société américaine et les tribunaux.

Le gouvernement de Donald Trump a en effet apporté son soutien aux employeurs. L'administration républicaine, arrivée au pouvoir avec le soutien de la droite évangélique, plaide pour une lecture étroite de la loi fédérale de 1964 qui interdit, entre autres, les discriminations "sur la base du sexe".

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"Le sexe ici fait référence au fait d'être né homme ou femme, pas à l'orientation sexuelle, ni l'identité de genre", a récemment estimé Noel Francisco, qui défend la position du gouvernement devant la Cour suprême. Pour lui, il revient au Congrès de faire évoluer la loi, pas à la justice.

Pourtant, selon leurs défenseurs, les droits des minorités sexuelles ont surtout avancé ces dernières années grâce aux tribunaux, dont la Cour suprême qui, en 2015, a légalisé le mariage homosexuel aux Etats-Unis.

"Cette fois, les enjeux sont plus importants parce que nous parlons de la possibilité de gagner sa vie", estime Ria Tabacco Mar de la puissante association de défense des droits civiques ACLU.

Seuls 22 Etats interdisent de discriminer les minorités sexuelles dans la sphère professionnelle. Ailleurs, il revient à la Cour suprême de sortir "les LGBT de leur statut de second rang", poursuit l'avocate militante.

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Mardi matin, une centaine de personnes étaient rassemblées devant la Cour suprême pour une manifestation de soutien aux plaignants, à laquelle devait participer l'actrice transgenre Laverne Cox.

"C'est un moment vraiment important pour que la cour montre que l'égalité ne doit pas être limitée au foyer, elle fait partie de notre société", a expliqué à l'AFP Amanda, 30 ans.

Karen Holmes, une militante transgenre de 62 ans, a estimé: "en 2019, c'est vraiment ridicule de devoir se battre pour chaque cas" de discrimination.

"Les mêmes droits"

La haute cour doit d'abord entendre les dossiers de Donald Zarda et de Gerald Lynn Bostock.

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Le premier, un moniteur de parachutisme de New York, a été licencié après avoir plaisanté sur son homosexualité pour rassurer une cliente sanglée à lui. Il est décédé depuis, mais ses proches poursuivent son combat judiciaire.

Le second, un travailleur social de Georgie, a été remercié peu après avoir rejoint une équipe sportive gay.

Le premier licenciement a été annulé en justice, le second validé, et cette différence d'interprétation justifie l'intervention de la Cour suprême.

Puis les neuf magistrats doivent se pencher, pour la première fois en débat public, sur le dossier d'une personne transgenre.

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Née de sexe masculin, Aimee Stephens a travaillé pendant six ans dans un funérarium de Detroit (nord) avant d'annoncer à son employeur vouloir vivre son identité de femme. Deux semaines plus tard, son patron lui annonçait que "ça ne pourrait pas marcher".

Celui-ci, Thomas Rost, affirme défendre ses valeurs chrétiennes et la nécessité de ne pas perturber ses clients dans leur deuil.

Très affectée, Aimee Stephens a décidé de se battre. "Il était temps que quelqu'un se lève et dise ça suffit", explique-t-elle. "On ne demande pas un traitement de faveur, on veut juste avoir les mêmes droits que tout le monde."

"Trop tôt"

Depuis sa décision historique sur le mariage homosexuel, la cour a basculé dans le conservatisme avec l'arrivée de deux juges nommés par Donald Trump. En juin 2018, la haute cour s'était rangée aux côtés d'un pâtissier chrétien qui refusait de faire un gâteau pour un mariage gay au nom de sa foi.

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Pour l'avocat Tom Goldstein, qui a souvent plaidé devant la Cour suprême, il est probable que le dossier arrive "trop tôt" devant la haute juridiction et qu'elle refuse d'étendre l'interprétation de la loi de 1964.

"Dans 20 ans, je pense que ce sera inconcevable socialement de discriminer des gays, des lesbiennes ou des personnes transgenres", explique-t-il.

Les employeurs ont d'ailleurs reçu de nombreux appuis, notamment des milieux religieux qui soutiennent des "croyants ordinaires dont les opinions sur le mariage et la sexualité ne sont pas en phase avec la culture actuelle".

Les salariés peuvent eux compter sur le soutien de nombreuses associations, d'élus démocrates ainsi qu'environ 200 grandes entreprises dont Apple, General Motors et Walt Disney.

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