32 % des hommes pensent que parler des règles au taf n'est "pas professionnel"

Publié le Mercredi 20 Novembre 2019
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Les "cup" menstruelles, redoutées au bureau ?
Les "cup" menstruelles, redoutées au bureau ?
Comment vérifier qu'un sujet est tabou ? En en parlant, bien sûr. Et en observant la réaction des gens alentours. Et dans le cas des règles, ça ne trompe jamais. La preuve ? Le sujet est encore loin d'être accepté en entreprise.
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A chaque thread, compte Instagram, livre ou festival militant, l'on se dit que cette fois, c'est bon : les menstruations sont enfin admises par le commun des mortels. Les règles, qui font partie de la vie de bien des femmes, ne susciteront bientôt plus la gêne et le jugement, la honte et la superstition. On les montre, on en parle, on décomplexe. Mais tout n'est pas si simple. C'est d'ailleurs ce que démontre une récente étude, focalisée sur ce qui "se fait" et ce qui "ne se fait pas" au sein de la sphère professionnelle.

Et on ne va pas se mentir, ce que dévoile ce sondage désespère un peu. Dans une étude initiée par une entreprise britannique spécialisé dans les produits d'hygiène, Initial Washroom Hygiene, et dévoilée par Refinery29, on apprend que sur 2 000 employés de bureau interrogés, près d'un tiers seulement de salariés masculins jugeraient "peu professionnel" de voir leurs consoeurs discuter de leurs règles au sein de leur lieu de travail. Bien que ce sujet intime ne les concernent pas vraiment (voire même pas du tout), ces hommes sont effectivement 32 % à exprimer leur malaise quant à l'évocation d'un tel sujet dans ce contexte particulier. Un fait plutôt éloquent et loin d'être si anecdotique.

Un sujet encore tabou

Les menstruations, un sujet à ne pas évoquer au taf ?
Les menstruations, un sujet à ne pas évoquer au taf ?

Ces chiffres ne risquent pas de renverser cette stigmatisation ancestrale qui envenime les menstruations. Car quand la gène envahit le bureau, elle ne concerne pas seulement deux-trois machos paternalistes. La preuve ? Initiée par Initial Washroom Hygiene, une entreprise britannique spécialisé dans les produits d'hygiène, cette étude nous démontre également que 48% des femmes interrogées se sentiraient mal à l'aise à l'idée "de parler des maux liés à leurs menstruations", comme les crampes menstruelles par exemple.

Les incidences de cette parole obstruée sur le bien-être des employées sont évidemment tout sauf positives. Puisque ce sujet n'est pas suffisamment pris en considération au bureau, voire carrément considéré comme "hors-propos" et contraire aux "bienséances" professionnelles, plus de la moitié des femmes sondées ont déclaré en conséquence "qu'elles ne prendraient pas un jour de congé-maladie en cas de douleurs chroniques" causées par leurs règles. Normal. Car si l'on en parle pas ou que l'on ose pas en parler aux collègues, comment l'évoquer à son patron ? Le dilemme est réellement problématique.

Les menstrues restent donc un sujet que l'on planque sous le bureau, au sens littéral du terme. L'enquête d'Initial Washroom Hygiene précise que 46% des femmes sondées ont déclaré qu'elles ne se sentiraient pas à l'aise à l'idée de sortir un tampon ou une serviette hygiénique du tiroir de leur bureau "devant un collègue". Pour que la parole se libère davantage, il faudrait peut être que les liens sororaux entre consoeurs de bureau se consolident. Mais là encore la lutte est loin d'être aboutie, à l'heure où quatre femmes sur dix déclarent utiliser un tampon et des serviettes hygiéniques trop longtemps (en dépassant les recommandations médicales) de peur de demander de nouvelles protections à leurs collègues de travail. Triste.

La porte-parole d'Initial Washroom, Sian Walkling, le déplore : "Le fait qu'un tiers des hommes pensent qu'une discussion adulte sur l'hygiène menstruelle n'est pas "professionnelle", et que près de la moitié des femmes se sentent mal à l'aise de discuter de cette composante de leur bien-être avec leur responsable professionnel, montre l'ampleur du travail qui reste à faire". Allez, au boulot ?