Harcèlement de rue : le mot de passe que les femmes peuvent prononcer à Reims

Grâce à la formule : «Où est Angela ?», les femmes victimes peuvent demander de l’aide dans les bars partenaires. Une idée venue du Royaume-Uni.

  Paloma et Marie  se sentent rassurées  par la mise en place  du dispositif « Où est Angela ? » auquel ont adhéré une dizaine de bars de la capitale champenoise  en mettant le pannonceau sur leur vitrine.
Paloma et Marie se sentent rassurées par la mise en place du dispositif « Où est Angela ? » auquel ont adhéré une dizaine de bars de la capitale champenoise en mettant le pannonceau sur leur vitrine. LP/Marie Blanchardon

    Un verre de bière à la main, les étudiants commencent à affluer sur le parvis de la place Stalingrad à Reims (Marne). Sur le trottoir de droite, le bar Kilberry ne désemplit pas. Et de l'autre côté, les fumeurs se massent à l'entrée du Stalingrad, comme tous les vendredis soir. Paloma et Marie rejoignent Agathe, Léo et d'autres étudiants de l'École supérieure d'art et de design. Une affichette attire leur attention : « Où est Angela? »

    Trois mots qui ne leur évoquent pas grand-chose. En réalité, c'est un mot de passe créé à l'origine, en 2016, dans l'est de l'Angleterre : « Ce n'est pas une question anodine, détaille Myriam Kaddouri-Espinasse, la présidente de l'association HeForShe, qui œuvre pour l'égalité homme-femme. Si on se sent suivi ou harcelé verbalement dans la rue, on peut utiliser ce code pour interpeller discrètement le staff de l'un des bars partenaires. »

    Ce dispositif est en place depuis une dizaine de jours à Reims à l'initiative de HeForShe. Il n'a donc pas encore eu l'occasion de faire ses preuves, mais il rassure la clientèle.

    « Ça nous est toutes déjà arrivé de presser le pas parce qu'un gars nous fait peur. Savoir qu'on peut être à l'abri dans ces bars, c'est une bonne chose. Ça n'arrive pas qu'à Marseille ou Paris, ça ne dépend pas de la taille de la ville, mais de l'heure et de l'endroit », témoigne Marie.

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    Une fois prévenue, l'équipe du bar a des réflexes clés en main à enclencher : proposer de s'asseoir, de charger son mobile, appeler un taxi…. « Ça se faisait déjà dans certains bars mais on est là pour créer des automatismes et rendre visible le dispositif grâce aux affichettes », explique Manon Hourlier, membre de HeForShe.

    «Ce dispositif devrait être valable partout»

    « C'est dommage qu'on en arrive là et c'est grave qu'en 2019 les femmes ne puissent pas se sentir en sécurité. C'est un gros problème en France », déplore Gabin Deweppe, responsable du bar du Stalingrad. Quand l'équipe de l'association HeforShe de Reims lui a proposé de devenir partenaire, il s'est engagé sans hésiter. « Si on peut aider, on le fait. Et ce dispositif devrait être valable partout. »

    Oui mais voilà, certains établissements ont préféré s'abstenir. « On n'est pas des psychologues, nous ont opposé certains patrons. Pour le moment on a une dizaine de bars partenaires mais on espère faire mieux dans les mois à venir », précise Myriam Kaddouri-Espinasse.

    Et l'équipe de HeForShe Campus Néoma Reims travaille également sur la création d'un kit de communication pour promouvoir le concept. L'objectif étant d'exporter le dispositif dans d'autres villes de l'Hexagone comme Nancy, Dijon ou Montpellier.

    À l'automne 2018, un collectif féministe étudiant avait déjà mis en place ce dispositif à Rouen, il s'était également inspiré de l'opération lancée au Royaume-Uni baptisée « Ask for Angela ».