Publicité

Entreprises cotées: «il manque 280 femmes» dans les organes de direction

Sous la pression politique et sociétale, la présence des femmes s'est accrue dans les conseils d'administration au cours de la dernière décennie, mais faute de quotas, elles restent encore sous-représentées dans les postes de direction, pointent des experts.

On ne compte que 20% de femmes au sein des comités de direction des entreprises cotées du CAC 40 et une part similaire (19%) dans ceux des entreprises du SBF 120, selon l’étude «Mixité au Sommet» sur la féminisation des comex du SBF 120 en 2019, réalisée par L’Express et Heidrick & Struggles pour «Somme Toutes».

Alors que le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) recommande une part de femmes au sein des instances dirigeantes de 40% d'ici à 2024, «il manque 280 femmes dans les comités exécutifs» pour atteindre cet objectif, soulignait mardi Sylvain Dhenin (Heidrick & Struggles) devant le gotha des grandes capitalisations boursières venu à la conférence annuelle d'Euronext.

Près de dix ans après la loi Copé-Zimmermann (2011) qui a imposé un quota de 40% de femmes aux conseils d'administration des grandes et moyennes entreprises, le but a été dépassé (44% en 2019 contre 10% dix ans plus tôt). Mais en l'absence de quotas, les efforts de féminisation au sein de leurs comités exécutifs, composés de leurs principaux dirigeants, ont été moins spectaculaires: de 7% en 2009 à environ 20% en 2019.

Si la moitié (52%) des sociétés du SBF 120 comptent plus de 20% de femmes dans leurs instances dirigeantes, seulement 7 (soit 6%) en comptent plus de 40%: Mercialys, Danone, GTT, Wendel, Gecina, Maisons du monde et Suez, selon le baromètre. «Cela reste une évolution lente et inégale, puisque encore 15% des sociétés du SBF 120 ne comptent aucune femme au sein de leur Comex», relève Jennifer Flock, de Heidrick & Struggles. «L'effet d'entraînement attendu des instances de gouvernance vers les instances de direction n'a pas eu lieu», constatait le mois dernier le HCE. Et pour cause, l'objectif est encore plus ambitieux: «on a beaucoup de femmes qui cumulent des postes d'administrateurs, tandis que par définition une femme dans un poste exécutif n'a qu'un job», rappelle Sylvain Dhenin. Les entreprises invoquent souvent la faiblesse de leur vivier en interne pour féminiser leurs instances dirigeantes.

Convaincu de la «nécessité d'avoir une diversité au sein des équipes de management», le directeur général de Suez, qui compte quatre femmes sur 11 dans son nouveau comité de direction, en a fait son credo. «À compétence équivalente, je choisis toujours une femme» pour «rééquilibrer le retard», dit Bertrand Camus, et «préparer les cadres du futur», qui puissent «prendre des responsabilités en particulier sur les sujets opérationnels». Au-delà de cette gestion prévisionnelle, une vraie politique pro-féminisation est menée par Suez pour «rompre les habitudes prises dans un monde fait par et pour les hommes»: vestiaire séparé, accompagnement sérieux sur le harcèlement, organisation flexible pour un équilibre entre vie professionnelle et personnelle.

Le jeu en vaut la chandelle puis que la corrélation entre la féminisation et la performance des entreprises a été mise en évidence.

Facteur de performance

Bertrand Camus dit l'avoir expérimenté: la féminisation «change la dynamique collective et très souvent, plus c'est difficile, plus les femmes réussissent». Après avoir simulé un portefeuille boursier composé d'actions d'entreprises dont l'encadrement est féminisé à plus de 40%, Michel Ferrary, chercheur à la Skema Business School et directeur de l'Observatoire de la féminisation, a démontré qu'ainsi, «on surperforme le CAC 40» sur le moyen et long terme. Au-delà du genre, les femmes apportent une autre diversité dans le profil d'éducation: elles sont deux fois plus nombreuses à être diplômées de l'université, selon l'étude.

Le respect de la diversité constitue un critère de taille dans le choix non seulement «des millenials» en tant que futurs employés, mais aussi dans celui des constitutions de portefeuilles financiers, souligne Isabelle Bourcier, de BNP Paribas AM. D'où l'idée de quotas, à laquelle réfléchit aussi Bercy, pour accélérer le processus. «Quand il n'y a pas de quota, les entreprises s'octroient des libertés», met en garde Michel Ferrary, évoquant le phénomène d'«évadés sociaux». Ces «entreprises françaises dont le siège se trouve à l'étranger ont un conseil d'administration qui comporte systématiquement moins de 40% de femmes», selon lui.

Entreprises cotées: «il manque 280 femmes» dans les organes de direction

S'ABONNER
Partager

Partager via :

Plus d'options

S'abonner
1 commentaire
  • dijonnais

    le

    Voilà qui va changer le monde!

À lire aussi