« Ces dernières semaines, tandis que s'aggravaient les pressions économiques et sociales et que la peur s'installait, le monde a connu une horrible flambée de violence domestique », a alerté António Guterres, secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, hier. Dans un appel aux États membres, il exhorte les gouvernements à faire cesser la violence faite aux femmes. « De nombreuses femmes et jeunes filles se retrouvent particulièrement exposées à la violence là où elles devraient en être protégées : dans leurs propres foyers », a-t-il déclaré. Le site internet de l’ONU indique par exemple que le nombre d’appels pour violences domestiques a doublé au Liban et en Malaisie et triplé en Chine. Une hausse des signalements de violences conjugales que connaît également la France avec plus de 36% d’appels la première semaine du confinement, a révélé le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, le 26 mars dernier sur « France 2 ».

Des services débordés par la demande

Au niveau mondial : « Le personnel de santé et la police sont débordés et en sous-effectif. Les groupes d’appui locaux sont paralysés ou manquent de ressources. Certains centres d’hébergement de victimes ont dû fermer leurs portes, d’autres sont pleins » s’alarme António Guterres. En France, la Fondation des femmes a lancé une collecte de dons à destination des victimes de violences conjugales mais aussi des centres d’appels et d’hébergements, à qui elle souhaite fournir de la nourriture. « Qui appeler à l’aide si les standards téléphoniques des associations ne répondent pas ? (…) Faute de moyens et peu équipées, des associations ont été contraintes de fermer leur standard téléphonique plusieurs jours ou de réduire leur service », a-t-elle alerté, dans un communiqué du 24 mars dernier. La Fondation des femmes veut ainsi financer « l’achat des équipements nécessaires à la continuité de leur activité, pour qu’aucune femme qui appelle à l’aide ne reste sans réponse ».

L’accès à l’IVG menacé

Parmi les violences faites aux femmes, les professionnels ont alerté sur le droit à l’IVG. Faute de personnel soignant — mobilisé dans la lutte contre le coronavirus — des associations et praticiens craignent une restriction de l’accès à l’ avortement. « Pour limiter la sollicitation des équipes hospitalières, nous souhaitons que les avortements puissent être autorisés par voie médicamenteuse au domicile jusqu’à neuf semaines d’aménorrhée, soit sept semaines de grossesse », ont appelé près de cent praticiens dans une tribune publiée dans « Le Monde », le 31 mars. Le ministre de la Santé Olivier Véran s’est voulu rassurant. « Il est hors de question que l’épidémie de Covid-19 restreigne le droit à l’IVG dans notre pays », s’est-il engagé, reconnaissant tout de même que « des remontées de terrain confirment qu’il y a une réduction inquiétante du recours à l’IVG ». 

Aux États-Unis, la lutte contre le Covid-19 a servi de prétexte à l’Alabama, au Texas et à l’Ohio pour réduire l’accès à l’avortement. Les trois États conservateurs ont voulu classer l’IVG parmi les interventions médicales non essentielles, en interdisant donc l’accès prioritaire. Une mesure heureusement contrée par les juges fédéraux. 

Le secrétaire général de l’ONU a tenu à réitérer son soutien dans la lutte contre toutes les violences à l’égard des femmes. « Ensemble nous pouvons et devons empêcher la violence partout, dans les zones de guerre comme dans les foyers, tandis que nous nous efforçons de vaincre le Covid-19 », a conclu António Guterres.