Coronavirus : la leçon de leadership de la Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern

Publié le Vendredi 10 Avril 2020
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Jacinda Ardern, une "masterclass" de la gestion de crise ?
Jacinda Ardern, une "masterclass" de la gestion de crise ?
Grand mix entre empathie et décisions claires, la gestion de la crise sanitaire actuelle par la Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern est exemplaire, et devrait en inspirer plus d'un (coucou Boris Johnson).
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Jacinda Ardern n'a beau avoir que 39 ans, cela fait trois ans déjà qu'elle porte sur elle ses hautes responsabilités de Première ministre de la Nouvelle-Zélande. Un statut complexe à assumer en pleine crise du coronavirus - une crise sanitaire, mais aussi politique, économique, humaine. D'ailleurs (et sans grande surprise), nombreux sont les politiciens à fléchir aujourd'hui, de l'argument absurde de "l'immunité collective" promu par Boris Johnson aux stratégies aveugles de Donald Trump, qui refuse encore et toujours un confinement global des Etats-Unis.

Oui, mais Jacinda Ardern dénote au sein du champ politique. De part et d'autre, les médias anglophones saluent ouvertement sa gestion de la catastrophe. Le site The Conversation l'érige même en leadeuse exemplaire : ses actes constitueraient une véritable "masterclass" - comprendre, une leçon de maître(sse). Mais pourquoi donc ?

Une gestion exemplaire

Pour des raisons bien précises, nous répond Ms. Magazine. Alors que le pays compte pas moins de 1 210 cas de coronavirus, les actes de la Première ministre ne se sont pas fait attendre. Dès le mois de mars, la jeune politicienne a ordonné aux Néo-Zélandais de "rester à la maison pour sauver des vies". Le 23 du mois précisément, un confinement général était annoncé. La stratégie était donc limpide : formuler, sécuriser, confiner. Et croire sur parole les recommandations alertes des épidémiologistes afin d'éviter les risques de contamination. Et ce alors (rappelons-le) que les Etats-Unis tardent à mettre en place un confinement global, quand bien même 1783 nouveaux morts auraient été dénombrées au cours des dernières 24 heures. Une tragédie.

La Première ministre ne se contente pas de "donner des directives". Dans le même élan, elle "donne du sens". Et c'est cet équilibre qui garantit sa maîtrise de la situation, "motivant les citoyens à livrer le meilleur d'eux-mêmes". Son discours motive puisqu'il ne s'attarde pas sur les pertes à venir, mais sur l'espoir qui fédère : il s'agit de "sauver des vies". Insister de façon claire sur cette dimension collective atténue le côté "ordre gouvernemental" de la chose. D'autant plus que cette communication se fait régulièrement sur Facebook, au fil de "Questions/Réponses" ludiques et en direct. Bien utile pour conscientiser de plus jeunes audiences.

Ce n'est pas tout, ajoute The Conversation. Selon le professeur britannique Keith Grint, expert en leadership, la politicienne se démarque également en parvenant à "persuader le collectif de prendre la responsabilité des problèmes". En cela, son petit plus, c'est encore l'empathie dont elle fait preuve afin de mieux sensibiliser. Jacinda Ardern "reconnaît ouvertement les défis auxquels nous sommes tous confrontés, des bouleversements de la vie familiale et professionnelle aux cas des personnes incapables d'assister aux funérailles de leurs proches", affirme Ms. Magazine. Une humanité qui l'honore en cette période de drames intimes et de doutes terrassants.

Un rapport à autrui évident lorsque la cheffe du gouvernement échange en compagnie du psychologue Nigel Latta (sur Facebook, toujours) afin d'évoquer la manière dont les citoyens peuvent faire face au confinement. Une approche humble, interactive et concernée, loin de la froideur méthodique de certains dirigeants. Mais par-delà cette bienveillance, la "méthode Ardern" portera-t-elle ses fruits dans les semaines à venir ? Il est trop tôt pour le dire. Toujours est-il que le Guardian l'affirme : cette approche diplomate peut "instruire" le monde. Et l'inspirer.