Déconfinement : "Hors de question de renvoyer des femmes chez leur bourreau"

"On pourrait faire face à une évolution des demandes de mise à l’abri dans les jours et semaines qui suivront le déconfinement", estime la secrétaire générale de la Fondation Nationale Solidarité Femmes (photo d'illustration).
"On pourrait faire face à une évolution des demandes de mise à l’abri dans les jours et semaines qui suivront le déconfinement", estime la secrétaire générale de la Fondation Nationale Solidarité Femmes (photo d'illustration). © AFP
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Marion Dubreuil , modifié à
Des places d'hébergement d'urgence ont été ouvertes durant la période du confinement pour mettre à l’abri les femmes victimes de violences conjugales qui étaient enfermés avec leur agresseur. A l’heure du déconfinement, se pose la question de la pérennité de ces places.

Comment protéger les victimes de violences conjugales alors que commence le déconfinement ? La question se pose alors que des places d'hébergement d'urgence avaient été ouvertes ces derniers mois, dans le contexte de l'épidémie de coronavirus. En Rhône Alpes, l’association VIFFIL (Violences Intra Familiales Femmes Informations Liberté) SOS Femmes a ainsi géré 33 situations d’urgences en un mois et demi, entre le 16 mars et le 26 avril : c’est deux fois plus que la moyenne de l’an dernier.

"J'ai senti qu'il allait me faire très mal"

Pour faire face à cette afflux de situations d’urgence, très souvent aggravées par le confinement, l’Etat a ouvert un centre de 60 places spécialement dédié à l'accueil des femmes qui ont fui un conjoint violent et de leurs enfants, au sein de la métropole de Lyon la Sentinelle. Cela fait un mois que Mila est hébergée à la Sentinelle, un soulagement après un mois enfermée dans un studio avec son mari. "Il m’a fait beaucoup de mal", confie-t-elle. "Plus le confinement avançait plus il était énervé, il criait m’insultait. J’ai eu très peur j’ai senti qu’il allait me faire très mal."

Depuis, Mila a sa chambre dédiée dans un centre dont l’adresse reste anonyme. Protégée par un portail sécurisé et les rondes des veilleurs de nuit, elle se sent soulagée et a de moins en moins de terreurs nocturnes, notamment grâce au suivi d’une psychologue. Mais elle le sait : le répit sera de courte durée. "Le 31 mai, le centre doit fermer et je dois trouver une solution", témoigne-t-elle. "Je n’ai pas de ressources, pas d’emploi, j’aimerais m’installer dans un logement stable avec un travail, à l’abri du danger de mon mari." 

"On cherche des solutions de relogement"

Malika Benzineb, en charge de ce centre éphémère pour l’association Le Mas, continue elle d’accueillir des femmes, avec une nouvelle entrée lundi, jour du déconfinement. "Il est hors de question que des femmes se retrouvent à la rue quand on devra fermer ce centre, parce que ce serait les renvoyer chez leurs bourreaux", explique la responsable, qui se bat pour pérenniser la structure. 

"On cherche des solutions de relogement depuis 15 jours, mais pour le moment je ne peux pas dire à chacune de ces femmes où est elle pourra aller après", déplore-t-elle. La métropole de Lyon s’est engagée à créer 1.500 hébergements pour les sans-abris avec des places dédiés aux femmes victimes de violences conjugales.

De nouvelles demandes après le déconfinement ? 

Les associations de protection des femmes espèrent maintenant un engagement fort du gouvernement. Et au-delà de la situation de celles déjà prises en charge pendant le confinement, l’inquiétude de Françoise Brié Directrice générale de la Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) est de ne pas pouvoir quantifier le nombre de femmes qui n’ont pas pu se manifester "du fait de la surveillance de leur agresseur et de l’augmentation des violences". "On pourrait faire face à une évolution des demandes de mise à l’abri dans les jours et semaines qui suivront le déconfinement", estime-t-elle.