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Place aux femmes capitaines



Sous-représentées dans le domaine de la pêche, des femmes capitaines de homardiers qui disent avoir été victimes d’intimidation souhaitent que les mentalités évoluent dans leur domaine majoritairement masculin.  

Lorsqu’elle était plus jeune, sur le bateau de son père, Alexandra Labbé apercevait au loin une femme aux commandes d’un homardier rouge. Cette femme, c’était Suzanne Bond. «Je n’en revenais juste pas» de voir une femme exercer, explique Alexandra, qui a appris son métier en suivant les traces de son père, aujourd’hui décédé d’un cancer des poumons.        

  

Steven Melanson/AGENCE QMI

  

Suzanne, qui habite Pabos, en Gaspésie, a été capitaine pendant plus de 14 ans. C’est son mari, qui est toujours capitaine, qui l’avait encouragée à se lancer. «Il n’y avait pas de femmes “pêcheurs” dans ce temps-là», se rappelle la dame de 62 ans qui a été forcée de prendre sa retraite l’an dernier pour des raisons de santé.        

Parce qu’elles sont des femmes   

Dans le sud de la Gaspésie, moins de 3% des permis de pêche au homard sont détenus par des femmes. Si elles s’entendent pour dire que leur métier est magnifique, Suzanne et Alexandra s’entendent aussi sur le fait qu’elles ne l’ont pas toujours eu facile.        

«On m’a volée, vraiment volée des cages. Couper mes bouées, mettre leurs bouées pour utiliser ma cage... Combien de fois je levais des cages et il n’y avait plus rien dans la cage? Pour une cage ou deux, ça peut aller, mais quand tu te retrouves avec 10, 15, 20 trappes, tu te dis oh...», se révolte encore Suzanne, souvent jugée de ne pas exercer un métier plus conventionnel comme celui d’infirmière, par exemple.        

Après seulement quelques années comme capitaine, Alexandra, 31 ans, dit avoir déjà vécu une situation semblable. «Il m’en manquait 30 [cages]», dénonce-t-elle. Et elles n’ont pas peur de le dire, elles ont été ciblées car elles sont des femmes.        

  

Steven Melanson/AGENCE QMI

  

«Une capitaine femme qui bosse un homme, ce n’est pas tout le monde qui aime ça. [...] Avec certains pêcheurs, c’est plus jaloux. Ils sont plus chiants. Il y en a, dans leur mentalité, c’est comme "la femme, tu n’as pas d’affaire là". Mais j’aime mieux l’oublier que d’en parler», convient Alexandra.        

Selon les deux capitaines, le métier évolue tranquillement, laissant lentement mais sûrement de l’espace aux femmes qui voudraient avoir des entreprises de pêche à leur tour. «Pourquoi on ne pourrait pas devenir pilote d’avion? On peut tout faire. Il n’y a rien qui arrête une femme», affirme Suzanne.        

Une saison dans l’incertitude        

Saison de pêche écourtée, dévalorisation du produit dans les épiceries, distanciation physique impossible sur leur petit bateau: les enjeux sont de taille pour les homardiers depuis le début de leur saison, et ce malgré l’aide fédérale de 470 millions $ pour leur venir en aide.        

«On est tous dans le même bateau, c’est le cas de le dire», affirme Alexandra Labbé, capitaine de homardier.        

  

Steven Melanson/AGENCE QMI

  

Avec une très faible demande de la part des restaurateurs, la capitaine redoute que le prix du homard soit si bas que les pêcheurs locaux n’arrivent plus à couvrir leurs dépenses opérationnelles (salaire des employés, essence, prix des appâts, etc).        

«Il n’y a pas de marché, tout est bloqué... L’Asie, l’Europe, tout! Ça fait que rien ne sort encore. Ils ont des stocks au Nouveau-Brunswick depuis le mois de novembre qu’ils n’ont pas encore liquidés», explique pour sa part Suzanne Bond, capitaine retraitée, mais aussi conjointe d’un capitaine qui reprenait le large la semaine dernière.        

«La distanciation, c’est impossible. Il n’y a pas d’autre mot: IMPOSSIBLE», tonne aussi celle qui craint pour la santé des pêcheurs de sa région, dont plusieurs sont âgés.        

Les deux capitaines supplient les Québécois d’acheter le homard d’ici et rappellent l’importance de vérifier que les homards portent un médaillon de traçabilité, qui confirme aux consommateurs leur achat local.

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