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Femmes

Une Française, première femme patronne d’une banque de développement

Odile Renaud-Basso, ex-directrice du Trésor, a pris cette semaine les rênes de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Partout où elle est passée, cette quinqua a défendu l’accession des femmes aux plus hauts postes.

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Odile Renaud-Basso, directrice du Trésor

Odile Renaud-Basso, nouvelle présidente de la BERD

JACQUES DEMARTHON / AFP

Après Christine Lagarde, qui a successivement dirigé le FMI, puis la Banque centrale européenne, c’est à nouveau une Française qui ouvre la voie des femmes à la tête de grandes institutions financières internationales. Odile Renaud-Basso, énarque passé par le ministère des Finances, la Commission européenne et la Caisse des dépôts, est depuis cette semaine la nouvelle présidente de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Et devient ainsi la première femme au monde à diriger une banque multilatérale de développement. La France a fait campagne durant plus d’un an pour promouvoir sa candidate et, en octobre, elle l’a finalement emporté face à l’ex-ministre des Finances italien, Pier Carlo Padoan.

Ce n’est pas la première fois que cette quinquagénaire étrenne la féminisation d’un poste stratégique. En 2016, elle avait été la première femme nommée à la direction du Trésor, la prestigieuse administration de Bercy, par François Hollande. "L’univers des hautes administrations économiques et financières demeure très masculin, remarque celle qui ne croisait quasiment que des hommes dans les réunions des directeurs du Trésor européens. Et les candidatures féminines restent trop rares aux postes où les processus de désignation sont très compétitifs."

Pragmatique, elle constate que le problème de l’accession des femmes aux plus hauts postes, en France comme à l’étranger, mêle souvent le machisme des milieux de pouvoirs et l’auto-censure des femmes qui s’additionnent pour réduire le vivier des candidates. "Même parmi les énarques ou les polytechniciennes, beaucoup de jeunes femmes hésitent encore aujourd’hui à candidater à certains postes, de crainte de devoir mettre de côté leur vie familiale", regrette-t-elle.

Briser le plafond de verre

Partout où elle passe, Odile Renaud-Basso, 55 ans, a à cœur de briser ce plafond de verre. A la direction du Trésor, longtemps réputé pour ses horaires à rallonge, elle a repris les préceptes de son prédécesseur Ramon Fernandez: pas de réunion après 19 heures, droit à la déconnexion, prévention du stress... Dès sa première semaine, elle s’était même payé le luxe de quitter, un jour, son bureau à 18 heures pour assister au spectacle de sa fille. "Je veux montrer qu’on peut être mère de famille et faire carrière au Trésor", nous confiait-elle alors. Elle qui n’avait trouvé que quatre femmes sur quatorze sous-directeurs en 2016 repart, quatre ans plus tard, en laissant la parité parmi les six chefs de service.

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Elle a aussi recruté l’universitaire Agnès Bénassy-Quéré, ex-présidente du Conseil d’analyse économique, au poste de chief economist. Une manière d’apporter un œil neuf sur la doctrine économique de Bercy, encore trop fermée à la recherche académique. A la BERD, Odile Renaud-Basso continuera son combat pour les femmes. "Promouvoir les femmes exige de la continuité dans les décisions de management", estime-t-elle, tout en soulignant que l’équipe de direction de l’institution européenne est déjà largement féminisée.

10 milliards d'investissements par an

Son intérêt pour la cause des femmes n’occultera toutefois pas le cœur de sa mission: diriger une banque qui a financé l’an passé pour 10 milliards d’euros de projets dans les pays en voie de développement, avec un ticket moyen de 25 millions d’euros. Une institution aux moyens moindres que la Banque mondiale mais qui se singularise par des investissements généralement liés à des réformes structurelles: libéralisation des prix, structuration des marchés financiers, renforcement de l’Etat de droit, lutte contre la corruption, etc. La BERD n’aide d’ailleurs que les pays "engagés à respecter et mettant en pratique les principes de la démocratie pluraliste, du pluralisme et de l’économie de marché".

Créée en 1991 à l’initiative de la France lors de la chute de l’URSS, la BERD est d’abord intervenue dans les pays d’Europe de l’Est pour favoriser leur transition vers une économie de marché. Elle a ensuite peu à peu étendu son périmètre à la Turquie, à l’Egypte, au Maghreb, à la Grèce et au Liban. Avec 3.000 salariés, dont 30% répartis dans une cinquantaine d’antennes locales, l’institution participe actuellement à des projets dans près de 40 pays, de l’Europe centrale à l’Asie centrale.

Les priorités bousculées par le Covid

"La question qui se pose désormais est de savoir si la BERD doit investir aussi en Afrique subsaharienne, relève la nouvelle présidente, et comment elle peut maintenir ses priorités autour de la transition énergétique et de la réduction des inégalités, alors que la pandémie de Covid-19 impose des mesures économiques d’urgence dans tous les pays qui sont touchés." Passionnée par les questions européennes, Odile Renaud-Basso connaît parfaitement les coulisses des institutions communautaires. Elle a été directrice des affaires économiques et financières à la Commission européenne de 2005 à 2010 où elle a connu le choc de la crise financière de 2008, puis cheffe de cabinet du président du Conseil européen Herman Van Rompuy jusqu’en 2012, au moment de l’élaboration du Pacte de stabilité budgétaire. Une connaissance intime de la diplomatie européenne précieuse à son nouveau poste.

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