Si aucun pays n’échappe à l’épidémie de Covid-19, aucun n’échappe non plus à l’explosion collatérale des agressions subies par les femmes, donnant cette année une résonance particulière à la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes, mercredi 25 novembre.
Flambée des viols au Nigeria ou en Afrique du Sud, hausse des disparitions de femmes au Pérou, augmentation des féminicides au Brésil ou au Mexique, associations débordées en Europe... la crise sanitaire mondiale a mis partout en lumière le fléau des violences sexistes et sexuelles.
Selon des données d’ONU Femmes publiées à la fin de septembre, le confinement du printemps a fait augmenter les plaintes ou appels aux autorités pour des violences domestiques de 30 % à Chypre, 33 % à Singapour, 25 % en Argentine ou 30 % en France.
Toujours selon l’ONU, au niveau mondial, seul un pays sur huit a mis en place des mesures pour atténuer les effets de la pandémie sur les femmes et les filles, dont la France, où des points de contact tenus par des associations ont été installés dans des supermarchés.
Mercredi, le président de la république, Emmanuel Macron, a d’ailleurs diffusé une vidéo sur les réseaux sociaux dans laquelle il appelle à utiliser les dispositifs d’alerte ou d’hébergement existants. « La première chose à faire, c’est alerter, dénoncer », poursuit le chef de l’Etat, que ce soit en appelant le numéro 39 19, en envoyant un SMS au 114 ou encore sur la plate-forme consacrée à cette question.
« A toutes celles qui ont encore peur de quitter leur foyer, je veux qu’elles sachent qu’elles ne se retrouveront pas seules », assure-t-il également, en rappelant que 1 000 nouvelles places d’hébergement seraient créées en 2021, comme en 2020.
« On n’écoute pas les femmes victimes de violences »
Pour les associations féministes, qui ont appelé à plusieurs rassemblements mercredi partout en France, beaucoup reste à faire pour lutter contre ce fléau. A Paris, plusieurs centaines de militantes ont manifesté en milieu de journée place de la République, en brandissant des pancartes proclamant « Grenelle blabla » ou « Vous ne nous ferez plus taire ».
Les manifestantes demandent en particulier des tribunaux spécialisés pour juger ces violences, ainsi qu’une revalorisation à hauteur d’un milliard d’euros du budget public consacré à la lutte.
« Monsieur le Président, depuis maintenant plusieurs années, nous savons que les femmes victimes de violences parlent. Le problème ? On ne les écoute pas », a de son côté réagi la militante féministe Caroline de Haas sur Twitter.
L’association Prenons la une, qui défend une meilleure représentation des femmes et l’égalité professionnelle dans les médias, a lancé quant à elle mercredi une plate-forme de soutien pour « écouter, informer et orienter » les journalistes victimes de violences sexistes et sexuelles au travail. Cette plate-forme est accessible à l’adresse allosexisme@prenonslaune.fr, a annoncé l’association de journalistes sur Twitter.
Une mobilisation en ligne
Elle est assurée par des bénévoles du pôle d’aide aux victimes de Prenons la une, formées par le Collectif féministe contre le viol (qui gère la permanence téléphonique Viols femmes informations) et l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail. Ce canal de soutien n’est pas « une plate-forme d’urgence », insiste toutefois l’association, invitant les personnes en danger de mort à composer le 17 ou à envoyer un SMS au 114 « pour joindre la police ».
Chaque année en France, quelque 220 000 femmes subissent des violences conjugales et 93 000 sont victimes de viol ou de tentative de viol. Paroxysme de ces violences, 146 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex en 2019, soit 25 de plus que l’année précédente.
Il y a an, lors d’une marche à l’ampleur jamais égalée en France, quelque 150 000 personnes avaient défilé à l’appel de ce collectif pour dire stop aux violences sexistes et sexuelles subies par des centaines de milliers de femmes chaque année en France. Cette année, c’est en ligne que la mobilisation a dû être menée samedi, à l’appel du mouvement #Noustoutes, qui souhaite « envahir les réseaux sociaux, à défaut de pouvoir envahir la rue ».
Au cours de la journée, des formations en ligne sur l’accompagnement des victimes ou l’éducation à la non-violence et des rencontres en direct avec des militantes et militants tels que la gynécologue Ghada Hatem, fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, l’avocate Elisa Rojas, militante pour les droits des personnes handicapées, l’élue écolo parisienne Alice Coffin, lesbienne et militante féministe, ou Lyes Louffok, défenseur de la cause des enfants, étaient programmées.
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