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L’inceste, ce crime encore trop banal perpétré à 96 % par des hommes

Selon l’enquête Virage, dont les derniers résultats ont été rendus publics lundi, un homme sur huit et près d’une femme sur cinq déclarent avoir subi des violences para ou intrafamiliales d’ordre psychologique, physique ou sexuel avant 18 ans.

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Publié le 23 novembre 2020 à 12h00, modifié le 23 novembre 2020 à 19h43

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Le 2 septembre 1986, dans l’émission « Les Dossiers de l’écran », sur Antenne 2, Eva Thomas raconte le viol perpétré par son père quand elle avait 15 ans. Pour la première fois, une victime d’inceste témoigne ainsi à la télévision, à visage découvert, et s’adresse « aux femmes qui ont vécu ça » pour leur dire « qu’il ne faut pas avoir honte ». C’est une déflagration. Le lendemain et les jours qui suivent, les articles sur l’inceste se multiplient. Eva Thomas, qui a fondé à Grenoble un an plus tôt l’association SOS Inceste, reçoit des centaines de messages. Les victimes prennent la parole pour dénoncer les ravages provoqués par ces relations sexuelles imposées par un adulte dans le cadre familial.

Trente-quatre ans plus tard, alors que, selon un sondage Ipsos pour l’association Face à l’inceste rendu public jeudi 19 novembre, un Français sur dix affirme avoir été victime d’inceste et que, selon l’enquête Virage conduite par l’INED en 2015 et dont les derniers résultats ont été rendus publics lundi 23 novembre, un homme sur huit (13 %) et près d’une femme sur 5 (18 %) déclarent avoir subi des violences para ou intrafamiliales d’ordre psychologique, physique ou sexuel (dont l’inceste) avant l’âge de 18 ans, quel chemin a été parcouru dans la reconnaissance et la lutte contre ce fléau ?

Deux avancées sur le plan du droit

Sur le plan du droit, deux avancées ont été enregistrées ces dernières années. En 2016, sous la pression des associations de victimes, le mot inceste fait son entrée dans le code pénal. Il désigne les viols et agressions sexuelles commises sur un mineur par un ascendant, un frère ou une sœur, mais aussi par un oncle, une tante, un neveu ou une nièce « si cette personne a sur la victime une autorité de droit ou de fait ». Sont également concernés les conjoints concubins ou pacsés de ces adultes ainsi que le tuteur ou la personne ayant l’autorité parentale. L’inscription a surtout un effet symbolique ; la loi sanctionnait déjà, avant cette date, les relations sexuelles au sein de la famille. Mais « on voulait que l’inceste soit désigné comme un crime à part entière, différencié du viol et de l’agression sexuelle », explique Isabelle Aubry, présidente et fondatrice de l’association Face à l’inceste.

Deux ans plus tard, elle repart au combat, avec d’autres, pour obtenir, cette fois, l’imprescriptibilité des viols et agressions sexuelles sur mineurs. Sans aller jusque-là, la loi du 3 août 2018 porte le délai de prescription pour le crime de viol sur mineur à trente ans à compter de la majorité de la victime, contre vingt auparavant. En revanche, au grand dam des associations de protection de l’enfance, la présomption de non-consentement à une relation sexuelle avec un adulte, un temps envisagée par le gouvernement, n’est finalement pas retenue. « On est un des seuls pays européens où il n’existe pas un seuil de consentement », déplore Catherine Milard, présidente de l’antenne nantaise de l’association SOS Inceste, qui y voit le signe que « notre société refuse de considérer la réalité des violences sexuelles et de l’inceste ». Ce qui a pour effet de provoquer, affirme-t-elle, « une incapacité à protéger les enfants ». Pourtant, les chiffres qu’elle avance, études à l’appui, font frémir. Sachant que l’âge moyen lors de la première agression est de 9 ans, « cela signifie que, sur une classe de CM2, trois enfants ont vécu ou sont en train de vivre des agressions sexuelles, qu’il s’agisse d’inceste ou de pédocriminalité ».

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