On estime qu’elles ont été près de 250 000. Dans les années 1950, 1960 et 1970, des centaines de milliers de femmes britanniques ont été forcées de faire adopter leur bébé. La cause ? Ces dernières étaient tombées enceintes sans être mariées, l’ultime péché pour l’époque. Aujourd’hui âgées de 70 ou 80 ans, elles souhaitent faire entendre leur voix et demandent des excuses gouvernementales, comme le rapporte la BBC dans un court reportage poignant.
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Ces mères forcées d’abandonner leurs bébés témoignent, la voix tremblante, de tout ce que cet événement a causé dans leur vie de jeune femme. "C'était la chose la plus honteuse qui pouvait arriver", raconte Jill Killington, de Leeds. Tombée enceinte en 1967, à l’âge de 16 ans, elle raconte qu’être une mère célibataire en ce temps-là "était décrit comme un sort pire que la mort". Reléguée à l’étage de sa maison, elle y a passé toute sa grossesse et devait se cacher lorsque des visiteurs venaient chez elle. "Ma mère me demandait de porter une alliance lorsque je sortais. C'était une période profondément humiliante", dit-elle.
Un véritable traumatisme
Au-delà de la peine immense de devoir abandonner leur bébé de force, ces femmes se souviennent douloureusement de l'humiliation à laquelle elles ont dû faire face. Ann Keen est tombée enceinte à 17 ans, en 1966, et se remémore un épisode particulièrement cruel lors de la naissance de son fils. "On ne m'a pas donné d'analgésique, raconte-t-elle. La sage-femme m'a dit : "Tu te souviendras de ça et tu ne seras plus jamais méchante". Les arguments avancés étaient que cette adoption était “ce qu’il y a de mieux pour le bébé et pour la mère”.
En analysant les données comprises entre 1945 et 1975, avant une modification de la loi sur l'adoption, on observe que près de 500 000 bébés ont été adoptés en Grande-Bretagne. Les avocats en charge de ces dossiers ont conclu que pour bon nombre d’entre eux, leurs mères étaient âgées de moins de 24 ans et non mariées. Leurs recherches vont plus loin en indiquant qu'environ la moitié de ces femmes ont subi des pressions persistantes pour abandonner leur bébé de la part de professionnels, notamment des médecins, des sages-femmes, des employés de foyers pour mères et bébés et du personnel chargé de l'adoption dans les foyers religieux et municipaux.
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Pour les enfants adoptés, le traumatisme était aussi bien réel, puisqu’ils n’avaient pas le droit de parler de leurs origines. Ils se sont donc interrogés sur le réel fondement de la séparation d’avec leur mère, quelle vie aurait été la pire ?
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Si certaines de ces femmes qui ont été forcées d’abandonner leur bébé ont pu construire une famille par la suite, d’autres n’ont jamais eu d’autres enfants. Une véritable tragédie pour elles. Éternellement traumatisées, elles souhaitent que leur pays prenne exemple sur l’Australie qui, en 2013, est devenu le premier pays à s’excuser publiquement pour les adoptions forcées.