Tribune. J’ai participé à ma première course de vélo lors d’une compétition entre les écoles de mon quartier. Avant cela, je ne savais pas que les filles pouvaient y participer. En Afghanistan, d’où je viens, il est trop risqué pour les femmes de faire du vélo. J’ai essayé d’autres sports, comme le basket, le taekwondo et le volleyball, mais ils se pratiquent dans des espaces fermés, comme des gymnases.
Avec le cyclisme, je pouvais aller partout, où je le voulais et quand je le voulais. J’adore être en extérieur, cela me procure un vrai sentiment de libération. Le sport m’a menée dans des endroits où je n’aurais jamais pensé me rendre. En Afghanistan, lorsque l’on voit une jeune fille à vélo, c’est étrange et peu commun. Les gens sont fortement influencés par ce que disent les autorités. Selon elles, les femmes n’ont pas le droit de travailler, d’étudier, ni de pratiquer un sport. Beaucoup d’Afghans l’ont simplement accepté ; pas mon père.
Mon père pense que les femmes doivent être libres de faire leurs propres choix. Il est convaincu qu’une femme peut travailler, avoir accès à l’éducation et être indépendante. Dans notre famille, nous sommes trois sœurs et mon père nous a toujours encouragées à poursuivre nos études, faire du sport, être des jeunes filles déterminées. Même lorsque le voisinage pensait que mes parents auraient dû avoir honte de nous.
Persévérance
Avec ma sœur, nous avons mis en place un club cycliste féminin. Nous voulions normaliser la discipline pour les femmes en Afghanistan, en leur montrant que faire du vélo est tout à fait normal et bon pour elles. Elles sont maintenant plus de 40. Lorsque j’ai commencé le cyclisme, on m’a averti que ce serait dangereux. Je n’aurais néanmoins jamais imaginé que ça puisse l’être autant.
Lorsque nous allions dans d’autres villes, certains habitants considéraient qu’il était de leur responsabilité de nous empêcher de faire du vélo. Il leur arrivait de nous faire tomber, de nous insulter. Chaque fille qui est montée sur un vélo en Afghanistan a connu cela. J’ai alors arrêté de m’entraîner seule. J’étais toujours accompagnée par des hommes.
Nous étions un groupe de filles au milieu et ils se positionnaient tout autour de nous. Ils nous cachaient des regards, pendant que l’entraîneur suivait dans sa voiture. Il y a tellement de fois où j’ai voulu arrêter le cyclisme… Mais je me disais : « Si tu abandonnes, ils verront que c’est trop dangereux. Ils verront que ce n’est pas sûr pour les femmes de participer. » Alors, j’ai persévéré.
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