La sentence illustre une fois encore la répression de toute opposition au régime d’Alexandre Loukachenko. La justice biélorusse a condamné, lundi 6 septembre, à onze ans de prison l’opposante Maria Kolesnikova, une des figures de la contestation de l’été 2020.
Sa condamnation et celle de son coaccusé, Maksim Znak, à dix ans de prison, ont été annoncées par le service de presse de Viktor Babaryko, un autre opposant emprisonné pour lequel ils avaient travaillé. Ils étaient jugés pour « complot visant à s’emparer du pouvoir » et d’« appels à des actions portant atteinte à la sécurité nationale ».
Condamnation « injustifiable »
L’Union européenne (UE) a condamné lundi le « mépris flagrant » de la Biélorussie pour les droits humains. Dans un communiqué, l’UE a réitéré également son appel à la libération « immédiate et sans condition de tous les prisonniers politiques » dans l’ex-république soviétique, qu’elle évalue à plus de six cent cinquante.
Le gouvernement allemand a, lui, dénoncé cette condamnation « injustifiable ». L’Allemagne demande « la libération de tous les prisonniers politiques en Biélorussie », a ajouté une porte-parole du ministère des affaires étrangères. « Nous continuerons bien sûr à maintenir la pression politique sur le régime et à soutenir activement la société civile », a-t-elle prévenu.
De son côté, le chef de la diplomatie britannique, Dominic Raab, a sommé le pouvoir biélorusse de « mettre fin à la répression ». « La condamnation de Maria Kolesnikova et de Maksim Znak montre que les autorités biélorusses poursuivent leur assaut contre les défenseurs de la démocratie et de la liberté », a déclaré M. Raab sur Twitter.
Les Etats-Unis ont jugé cette condamnation « honteuse », qualifiant les poursuites contre Maria Kolesnikova et Maksim Znak de « politiques ». « Ces verdicts sont une preuve de plus du mépris total du régime pour les droits humains et les libertés fondamentales du peuple de Biélorussie », a dit le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, dans un communiqué.
Répression sans retenue depuis des mois
Le procès des deux opposants, incarcérés depuis onze mois, avait commencé au début d’août et s’est tenu à huis clos, si bien que peu de détails ont filtré, d’autant que la plupart des médias indépendants, ONG et mouvement d’opposition ont subi une répression sans retenue depuis des mois.
Selon des images diffusées lundi par des comptes de la messagerie Telegram, Mme Kolesnikova, 39 ans, souriante, a fait un signe de cœur avec ses mains menottées dans la cage de verre réservées aux accusés. Ce signe était l’un des gestes de ralliement durant la contestation de 2020.
La jeune femme avait été arrêtée en septembre après avoir résisté de manière spectaculaire à une tentative des autorités de l’expulser de son propre pays. Selon ses proches, les services de sécurité biélorusses (KGB) l’ont enlevée, puis lui ont mis un sac sur la tête pour la conduire à la frontière ukrainienne. Refusant de quitter la Biélorussie, elle a sauté d’une fenêtre et a déchiré son passeport, ce qui a entraîné son incarcération.
Mouvement de contestation inédit
Mme Kolesnikova était l’une des trois femmes propulsées à la tête du mouvement de contestation, avec Svetlana Tsikhanovskaïa, candidate à la présidentielle à la place de son mari emprisonné, et Veronika Tsepkalo. Ces deux dernières ont fui le pays, sous la pression des autorités. Svetlana Tsikhanovskaïa a réagi sur Twitter au verdict, demandant « la libération immédiate de Maria et Maksim ». « Il s’agit de terroriser les Biélorusses qui sont opposés au régime », a-t-elle estimé.
« Le courage de Maria, qui a décidé de rester en Biélorussie malgré une menace d’une lourde peine de prison, ne sera pas oublié », a souligné de son côté l’ONG Amnesty International dans un communiqué.
Le mouvement de contestation inédit en Biélorussie, qui a rassemblé des dizaines de milliers de manifestants dans les rues, est né en août 2020 à la suite de la réélection jugée frauduleuse d’Alexandre Loukachenko, aux manettes du pays depuis 1994.
Ce mouvement a été progressivement maté, avec des milliers d’arrestations et les exils forcés ou les emprisonnements de dirigeants politiques de la contestation, de responsables de médias et d’ONG.
Contribuer
Réutiliser ce contenu