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Violences conjugales : l'Australie verse de l'argent aux victimes pour les aider à quitter leur bourreau

Cette aide est ouverte aux femmes comme aux hommes, mais les données recueillies par le gouvernement australien montrent que les premières sont bien plus nombreuses à subir des violences conjugales. [Alexas_Fotos/Pixabay]

En Australie, une femme est tuée par un partenaire abusif tous les neuf jours. Pour tenter d'éviter de tels drames, le gouvernement a imaginé un programme pilote visant à fournir aux victimes de violences conjugales un soutien financier ponctuel, censé leur permettre de mettre fin à une relation abusive.

Le dispositif, qui est entré en vigueur ce mardi 19 octobre, doit faire l'objet d'un essai d'une durée de deux ans. Il prévoit une somme de 5.000 dollars australiens (un peu plus de 3.200 euros, NDLR), dont une partie en espèces, pour couvrir des dépenses telles que les frais de scolarité d'éventuels enfants.

Il est ouvert aux femmes comme aux hommes, mais les données recueillies par le gouvernement australien montrent que les premières sont bien plus nombreuses à subir des violences conjugales.

Aussi, cette nouvelle aide financière fait partie d'un programme plus large dédié à la sécurité des femmes en Australie. Annoncé en mai, il dispose d'une enveloppe de 1,1 milliard de dollars australiens (environ 700 millions d'euros). La UnitingCare Australia, en charge de cet essai censé durer deux ans, a indiqué avoir reçu plusieurs appels et messages de personnes potentiellement éligibles pour cette aide, avant même l'ouverture des candidatures.

Cela n'a malheureusement rien d'étonnant, à en croire Mary Crooks, directrice exécutive du Victorian Women's Trust. Interrogée par CNN, elle prend acte de l'initiative du gouvernement mais estime qu'elle ne s'attaque pas aux racines profondes du problème. Elle encourage le pays à engager un véritable débat sur le sexisme ancré dans la société australienne, qui participe à la mise en danger des femmes.

D'ailleurs, souligne Mary Crooks, cette aide, certes bénéfique, sous-entend encore qu'il revient à la victime, la plupart du temps féminine, de tout quitter pour fuir son bourreau. «Il y a un gros problème moral, éthique et politique ici, assure-t-elle. Pourquoi doit-elle encore traverser ce traumatisme extraordinaire et cette dislocation de sa vie alors qu'elle n'est pas celle qui a commis le mal ?».

Sachant que, selon une estimation du Conseil australien des syndicats datant de 2017, les victimes doivent débourser une somme conséquente, en moyenne 18.000 dollars australiens (soit 11.500 euros), pour quitter un foyer toxique et trouver la sécurité. Cela inclut l'embauche d'un avocat, un déménagement puis l'aménagement d'un nouveau logement, sans compter la nourriture et les dépenses quotidiennes notamment liées aux enfants, s'il y en a.

L'écart de rémunération femmes-hommes à 13,4%

Une démarche très coûteuse et le plus souvent imposée aux femmes, alors même que ces dernières disposent de revenus plus faibles. En effet, d'après les résultats du Global Gender Gap Report 2021 du Forum économique mondial, l'Australie est mauvaise élève en matière d'égalité des sexes. Elle se classe au 50e rang, loin derrière les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France ou la Nouvelle-Zelande. Dans son rapport budgétaire pour les femmes, dévoilé au mois de mai, le gouvernement australien a indiqué que l'écart de rémunération femmes-hommes avait atteint un niveau record, à 13,4%.

Une dynamique qui peut contribuer à un déséquilibre dans les relations et rend de manière certaine les femmes plus vulnérables économiquement. Sans compter que la pandémie a aggravé ces disparités. Les Australiennes ont été plus nombreuses que leurs homologues masculins à perdre leur emploi ou voir leurs horaires réduits pendant les confinements et diverses fermetures.

Comme en France, la crise sanitaire a aussi entraîné une hausse des violences intrafamiliales. Les circonstances, notamment les confinements, ont empêché de nombreuses victimes de quitter un partenaire abusif. Et puisqu'en Australie, l'allègement des restrictions a coincidé avec l'explosion des coûts de location, la situation reste difficile aujourd'hui.

Pour répondre au besoin urgent de lieux d'accueil, la Nouvelle-Galles du Sud, Etat le plus peuplé du pays, a annoncé ce mardi un plan de 484 millions de dollars australiens (plus de 310 millions d'euros). Cet argent doit notamment permettre la construction de 75 refuges pour les victimes de violences conjugales. Une décision qui va dans le bon sens puisque, selon la présidente de Domestic Violence NSW, Annabelle Daniel, le nombre de personnes sans solution «augmente continuellement».

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