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High-tech

Les gobelets des distributeurs d’eau deviennent des prothèses !

Que faire des millions de gobelets en plastique qui tombent des fontaines d’eau et des machines à café ? Des prothèses pour enfants handicapés, propose une start-up spécialisée dans le recyclage des déchets.

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Une petite fille porteuse d'une prothèse E-nable

Une petite fille porteuse d'une prothèse E-nable fabriquée à partir de gobelets en plastique.

Canibal

GÂCHIS. L’humanité de la pause-café gâche tous les ans mille milliards de gobelets en plastique, dont la moitié rien que pour les machines à eau. En dehors de leur domicile, les hordes de salariés assoiffés n'ont strictement aucune solution pour trier cet embarrassant déchet de quelques grammes généré au sein de leur entreprise ou dans l’espace public. Et c’est précisément là que se positionne Canibal. "Ces verres en plastique partent en partie dans la poubelle mais sont souvent jetés pour terminer dans les mers parce que le consommateur ne sait pas quoi en faire, dénonce Benoît Paget, fondateur de Canibal en 2009. Le but de notre entreprise, c’est de collecter ce déchet pour leur redonner une destination noble". Et depuis quelques jours, preuve est faite qu’il peut être transformé en prothèse de main.

Tout commence par la collecte. Dans un espace public, il faut savoir convaincre d’accomplir le bon geste. Canibal, c’est une machine capable de trier les cannettes de verre, d’aluminium et de plastique. "Notre stratégie, c’est de vendre ces réceptacles aux entreprises, de les louer à de grands évènements comme les festivals de musique ou les manifestations sportives, poursuit Benoît Paget. Et nous essayons de transformer ce geste utilitaire en jeu pédagogique portant sur l’importance du recyclage". Sur 4 milliards de gobelets utilisés tous les ans en France, moins de 1% est recyclé. Canibal ambitionne d’améliorer ce très mauvais résultat.

Transformer un déchet en objet de haute technologie

MÉLANGE. Cela passe en priorité par une solide filière industrielle de recyclage. Or, cette réutilisation n’a rien d’évident. Canibal récupère 30 à 40% de verre et d’aluminium orienté sans problème vers les usines appropriées. Pour les 60 à 70% de gobelets, c’est une autre paire de manche. Ceux-ci sont souillés et surtout mélangés entre les récipients en polypropylène (PP) des distributeurs d’eau et le traditionnel polystyrène (PS) résistant à la chaleur des machines à café. "Avec l’aide d’un bureau d’études, nous avons breveté une technique d’extrusion de ces PP et PS en mélange qui nous permette de produire des granulés réutilisables dans l’industrie par leur refonte", poursuit Benoît Paget. Depuis 2015, Canibal peut désormais revendre ces granulés pour un nouvel usage. La première de cette nouvelle destination, c’est la fabrication de panneaux isolants utilisables dans le bâtiment, mais aussi la production de poubelles. C’est ainsi que dans un lycée parisien, les étudiants sont informés que la matière du gobelet jeté dans le Canibal de leur cafétéria est réutilisée comme revêtement des murs de leur établissement. De même, en entreprises, les poubelles qui collectent les déchets des machines à café annoncent fièrement leur provenance.

"Mais nous recherchons toujours des usages plus nobles pour ce matériau", assure Benoît Paget. C’est ainsi qu’est venue l’idée de transformer les granulés en filaments susceptibles d’être utilisés dans des imprimantes 3D. En 2016, s’est justement créé une association, E-nable, spécialisée dans la fabrication sur mesure et à faible coût de mains imprimées en 3D. Ces bénévoles diffusent une prothèse standard dont la mécanique permet d’agripper et relâcher des objets, sans qu’il y ait de moteur. Avec l’aide du designer Vincent Rahir, Canibal est arrivé à prouver que son matériau permet bien de fabriquer les petites pièces composant les mécanismes très précis permettant d’avoir des doigts de plastique agiles et efficaces. Les handicapés ciblés, ce sont les 300 enfants qui tous les ans naissent avec une agénésie, c’est-à-dire la malformation ou la non formation d’un membre.

C’est ainsi que selon les règles de l’économie circulaire, un déchet devient un objet de haute technicité. Ce cercle vertueux est pour l’instant extrêmement marginal. En six ans, 150 Canibals seulement ont été installés soit en location, soit vendus à des entreprises soucieuses de concrétiser leur politique de "responsabilité sociale et environnementale" (RSE). Pour améliorer un schéma économique encore tremblotant et imposer ses machines à collecte à proximité des distributeurs, Benoît Paget envisage d’avoir recours à la publicité. Les gobelets se recyclent, il suffit désormais de faire le bon geste lors de la pause !

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