« À la vie » : un documentaire poignant sur le post-partum

Dans « À la vie », la réalisatrice Aude Pépin rend hommage au travail vital de Chantal Birman, une sage-femme libérale et féministe, qui s’apprête à partir à la retraite. Le documentaire raconte alors le parcours engagé d’une véritable héroïne du quotidien face aux tourments des jeunes mères à leur retour de la maternité. En parallèle de ce portrait poétique, le film dresse un tableau inquiétant de la prise en charge du post-partum dans notre pays.

De jeunes mères délaissées, une sage-femme engagée

Pour son premier documentaire, la réalisatrice et actrice Aude Pépin a cherché à montrer au monde entier un métier essentiel, face aux non-dits sur les débuts difficiles de la maternité. De manière frontale et poétique, elle rend alors hommage aux femmes, à travers le portrait de Chantal Birman, sage-femme libérale et militante féministe. À 70 ans, dont plus de 50 passés au service des femmes, madame Birman accompagne les jeunes mères dans leur post-partum.

Elle se déplace à travers les différents vécus et classes sociales des mères du département de la Seine-Saint-Denis. Avec sa petite valise, et parfois accompagnée d’une stagiaire appartenant à la nouvelle génération de sages-femmes, Chantal Birman comble l’abandon des jeunes mères après leur accouchement. Elle conseille des femmes qui subissent des dépressions post-partum dans la solitude, et leurs angoisses face à leur futur rôle de mère. Elle vérifie aussi les cicatrisations, l’état du cordon ombilical, aide à gérer l’allaitement, et se réjouit d’une courbe de poids qui part à la hausse.

Filmer la détresse des jeunes mères dans leur intimité

Comment filmer des femmes en situation de détresse psychologique, voire physique, dans leur intimité ? Et comment arriver à convaincre ces jeunes mères de se laisser documenter presque à nu devant une caméra ? L’urgence de lever les tabous. Ces femmes ont accepté le défi pour dénoncer le manque de considération des jeunes mères après leur accouchement. Quand notre société s’occupe à célébrer le bonheur de la maternité, elle devient aveugle face aux bouleversements post-partum.

Aude Pépin a fait le choix de raconter cette histoire comme Chantal Birman aborde ses patientes : sans filtre et avec tendresse. On plonge alors directement dans l’intime de ces jeunes mères, avec de gros plans, frontaliers, impudiques.

Ces images nous permettent de comprendre que la maternité parfaite et heureuse n’existe pas. Du moins elle n’existe pas sans la solitude, la fatigue, les larmes, la peur de ne pas bien s’y prendre, les seins lourds, les tétons archisensibles, ou les agrafes sur le bas-ventre.

« Lorsqu’on accouche, on a des bleus à la vulve, des déchirures, des balafres avec des agrafes qui peuvent faire 20 centimètres de longueur et on laisse les femmes rentrer comme ça chez elles avec un enfant sous le bras, c’est impensable quand on y réfléchit bien » explique Aude Pépin.

La transmission d’une sage-femme militante

Face à ces tourments post-partum, la sage-femme pose avec beaucoup d’humanité les mots qui apaisent. Pour la réalisatrice, il fallait révéler le personnage iconique de Chantal au grand public. Avec elle, on passe de la joie aux larmes. Peu de choses peuvent arrêter cette militante qui effectue un travail de fourmi pour aider d’autres femmes. Elle transmet ses luttes, ses pratiques, ses connaissances et sa bienveillance aux femmes.

« J’ai pu constater que Chantal était comme une anthropologue des femmes post-accouchement, elle réussissait à les scanner et à comprendre leurs problématiques en moins d’une minute. (…) Je voulais saisir l’essence de ce qu’était le post-partum, ce moment où les femmes tâtonnent dans le noir qui est finalement très universel », explique Aude Pépin à Cheek Magazine

De plus en plus politique, la réalisatrice aborde à la fois les luttes féministes passées pour les droits des femmes, et celles à maintenir aujourd’hui. Certes, sage-femme est un « beau métier », mais il faut le revaloriser.

De plus, la réalisatrice explique qu’il y a trois ans, lorsqu’elle avait pensé ce documentaire, personne ne parlait du post-partum. Et si aujourd’hui on en parle beaucoup plus, les souffrances psychologiques, elles, restent encore taboues. L’injonction au bonheur dans la maternité ne permet pas aux jeunes mères d’avouer facilement leurs doutes, leurs tristesses, et parfois même, leurs pensées suicidaires.

Et ceci n’est pas sans conséquence. En France, le suicide est la deuxième cause de mort des futures ou jeunes mères. Le documentaire « À la vie » est donc un témoignage unique de ces difficultés invisibles aux yeux de notre société.

« J’espère que ce film va faire que les pouvoirs publics vont changer les choses », explique en ce sens Aude Pépin à Média Part.

« À la vie » est en salles depuis le 20 octobre. Allez-vous aller le voir ? Partagez vos impressions avec nos lecteurs et lectrices sur notre forum !

Cindy Viallon
Cindy Viallon
Journaliste free-lance, mes sujets de prédilection sont les féminismes intersectionnels, la société et la culture. J’aime déconstruire l’actualité et briser les tabous une fois pour tous·tes !
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