40 %, c’est le pourcentage de femmes que devaient compter, au 1er janvier 2017, les sociétés cotées en bourse ainsi que celles non cotées mais comptant plus de 500 salariés et chiffre d’affaires de plus de 50 millions d’euros. C’est l’objet de la loi Copé-Zimmerman, adoptée en 2011. L’objectif légal a-t-il été atteint en 2017 ? Pas pour tout le monde ! Les entreprises du CAC 40, ont effectivement franchi le cap légal puisqu’elles comptent 40,1% de femmes dans leur instance dirigeante.  En revanche, dans les sociétés non cotées en bourse mais également concernées par la loi, le pourcentage de femmes tombe à 15%. « Lorsqu’on a publié le rapport en 2015 soulignant ces 15%*, on a analysé que beaucoup d’entreprises, plus petites que celles du CAC 40, avaient des gouvernance familiales », nous explique Karima Bouaiss chercheure, maître de conférences à l’université de Lille, Droit et Santé. « Les membres des conseils d’administration sont davantage les pères, les frères et amis de la famille que des personnes extérieures et a fortiori des femmes éloignées de la famille. »

 Quelles sanctions pour les entreprises hors-la-loi ?

Dans une tribune publiée sur le site du « Monde » le 6 juillet dernier, trois représentantes de la Fondation des Femmes questionnent l’efficacité des sanctions prévues par la loi telles que la suspension des jetons de paiement (la rémunération des membres du conseil d’administration) et la nullité des nouvelles nominations. Ces sanctions seraient peu engageantes pour les entreprises non cotées. « Les plus petites entreprises ne peuvent pas rémunérer la présence au conseil d’administration, d’autant plus s’il est composé par la famille ou le cercle proche. L’annulation de ces jetons de présence ne représente pas une vraie menace pour ces petites structures», ajoute Karima Bouaiss.

La pratique du « name and shame »

Si les sanctions ne suffisent pas, la solution du « name and shame », cette pratique visant à publier le nom des entreprises qui ne respectent pas la loi, est évoquée par les rédactrices de la tribune. C’était, par ailleurs, une promesse du président Emmanuel Macron concernant les organisations ne respectant pas l’égalité entre les femmes et les hommes**. « Je reste dubitative sur cette pratique qui risquerait d’instaurer un climat d’oppression sur les entreprises de taille moyenne. En revanche, la mise en valeur de bonnes pratiques et la démonstration d’un gain de performance grâce à la mixité, motivera les entreprises », défend Karima Bouaiss, qui travaille actuellement à la rédaction d’un rapport sur le sujet, à paraître à la rentrée 2017. Deux solutions ont été évoquées par Marlène Schiappa, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, lors d’un événement organisé par le réseau de femmes Financi’elles, le 5 juillet dernier.

Elle y a proposé un tour de France des bonnes pratiques en termes d’égalité au travail et a déclaré « assumer l’idée que la performance résultant de la mixité doit être mise en avant auprès des entreprises », un argument qui ne fait pas toujours l’unanimité et qui laisse une question en suspens : quand le bénéfice économique ne sera plus prouvé, qu’en sera-t-il de la mixité en entreprise ? Quoi qu’il en soit, de nombreux efforts restent encore à fournir pour arriver à une gouvernance des entreprises françaises totalement paritaire !

* Rapport : « Application de la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils : état des lieux pour les sociétés en deçà du SBF120 », à la demande de la Direction Générale de la Cohésion Sociale - DGCS – 26 pages, 2015. Avec Viviane de Beaufort (CEDE – ESSEC Business School).

** D'après le décret du 18 décembre 2012 et qui a été publié dans le cadre de la loi sur la réforme des retraites de 2010. Il oblige notamment à rémunérer de la même façon, les femmes et les hommes occupant le même poste.