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Aux Etats-Unis, Facebook collecte les données de femmes effectuant des recherches sur l'avortement

Des défenseurs du droit à l'avortement devant la Cour suprême des Etats-Unis le 1er décembre 2021 à Washington

Des défenseurs du droit à l'avortement devant la Cour suprême des Etats-Unis le 1er décembre 2021 à Washington - Leigh Vogel © 2019 AFP

Plus de 294 sites web de clinique, sur 2500 analysés, ont envoyé des données sensibles à Facebook concernant des personnes se renseignant sur l'avortement.

Alors que le droit à l'avortement pourrait être remis en cause dans plusieurs États des États-Unis, la question de l'identification des femmes concernées pose problème. De nombreuses craintes ont déjà été formulées ces dernières semaines, notamment par des élus américains craignant que la vie privée de ces femmes soit en danger.

Ces inquiétudes commencent à se concrétiser chez Facebook, soupçonné de collecter des données particulièrement sensibles. Une enquête conjointe de Reveal News, une ONG de journalisme d'investigation et du média américain The Markup, indique que le géant des réseaux sociaux récolte les données de personnes s'étant rendues sur les sites web de "crisis pregnancy center", des cliniques semi-médicales, souvent tenues par des organisations religieuses et dont l'objectif est de convaincre les patients d'avoir recours à d'autres options que l'avortement.

Après avoir analysé 2.500 sites web rattachés à de tels établissements, les journalistes ont constaté que 294 d'entre eux ont envoyé les données personnelles d'internautes à Facebook.

Données sensibles

Pour analyser ces sites web, les deux médias y ont cherché la présence du "pixel" de Facebook, un service de collecte de données de Facebook.

Dans les faits, le "pixel" Facebook est un bout de code informatique, que n'importe qui peut utiliser sur son site Web. Il est chargé d'enregistrer l'identifiant rataché à chaque visiteur du site afin de tracer son parcours sur d'autres sites Web pour finalement lui proposer des publicités ciblées sur Facebook. Un ciblage qui tire profit des informations récoltées, dans le but de proposer les produits ayant le plus de chances de plaire à l'internaute.

Toutefois, les conditions d'utilisation de l'entreprise sont formelles: elle a interdiction de collecter certaines données, dont les informations liées à la santé et à la sexualité. Une règle qui ne semble pas respectée dans ce cas de figure, alors même que le transfert de ces données pourrait mettre en danger les femmes concernées.

"Plus d'un tiers des sites (parmi les 294, ndlr) ont envoyé à Facebook les données liées à des motifs tels que "consultation avortement" ou "échographie de contrôle pré-avortement". Au moins 39 de ces sites ont envoyé des détails comme le nom de la personne, son adresse email ou son numéro de téléphone", indique Reveal News.

Si la présence et l'échange de ces données a été confirmée par l'enquête, il est toutefois impossible de savoir ce qu'il en est réellement fait par la suite.

"C'est à l'encontre de notre politique concernant les sites et applications d'envoyer des données sensibles via nos outils réservés aux entreprises. Notre système a été créé de manière à filtrer les données sensibles qu'il détecte, et nous travaillons avec les publicitaires pour leur apprendre à correctement utiliser nos outils", a déclaré Facebook dans un communiqué envoyé à Reveal News.

L'entreprise n'a cependant pas répondu aux questions concernant le fonctionnement exact de son système de filtrage, censé permettre d'éviter ce type d'abus.

Victoria Beurnez