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81% des Français se disent favorables à l’inscription du droit à l’avortement dans la Constitution

Selon un sondage Ifop réalisé pour la Fondation Jean-Jaurès, 77% des personnes interrogées estiment même que cela serait utile. Mais la voie législative pour faire aboutir un tel projet semble longue, et compliquée.
par Arthur Quentin
publié le 5 juillet 2022 à 12h05

Si la question de l’IVG déchire les Etats-Unis – malgré une opinion publique largement favorable – après le renversement de l’arrêt «Roe v. Wade», qui garantissait ce droit fondamental aux Américaines, en France, elle fait apparemment presque consensus. Selon un sondage Ifop réalisé pour la Fondation Jean-Jaurès et publié par France Info mardi 5 juillet, 81 % des personnes interrogées sont favorables à la constitutionnalisation du droit à l’avortement et 77 % d’entre eux estiment qu’il serait utile de l’inscrire dans la Constitution.

Ce sondage réalisé auprès d’un échantillon national représentatif de 1 009 personnes détaille le taux d’adhésion des Français à une telle mesure en fonction de leur vote lors de la présidentielle. Les électeurs de Yannick Jadot y sont le plus favorables : 91 % d’entre eux souhaitent que l’accès à l’IVG soit inscrit dans la Constitution. Derrière, suivent ceux d’Emmanuel Macron (87 %) et de Jean-Luc Mélenchon (85 %). A droite, même les Français ayant voté pour Marine Le Pen sont 80 % à se déclarer en faveur d’une garantie de ce droit. Soit plus que ceux ayant voté pour Valérie Pécresse (77 %). Tout juste plus de la moitié des électeurs d’Eric Zemmour (59 %) y sont favorables.

Discours anti-IVG amplifiés par les réseaux sociaux

Le 25 juin, dès le lendemain de la révocation de l’arrêt «Roe v. Wade» par la Cour suprême des Etats-Unis, la cheffe de file des députés LREM Aurore Bergé a déposé une proposition de loi constitutionnelle pour protéger l’accès à l’IVG. La Nupes ainsi que les sénateurs socialistes et communistes ont aussi fait des propositions similaires. De leur côté, plusieurs figures affirment que l’accès à ce droit ne serait pas menacé en France. Pourtant, les discours anti-IVG existent en France. Et s’ils sont minoritaires, ils se trouvent amplifiés par les réseaux sociaux qui facilitent leur propagation.

D’après l’étude de la fondation Jean-Jaurès, 31 % des Français jugent possible que le droit à l’avortement puisse être remis en cause dans un avenir proche dans notre pays. Cela peut paraître peu, mais cela représente une augmentation de trois points par rapport à une étude similaire réalisée pour le magazine Marie-Claire en 1995. Au total, 56 % des sondés estiment qu’un tel scénario serait impossible, contre 64 % dans le sondage de Marie-Claire, et 13 % qui ne se prononcent pas. La menace d’une remise en question de cette liberté fondamentale est plutôt faible, mais pour Aurore Bergé il ne faut pas perdre de temps pour autant. «Les droits des femmes ne sont jamais des acquis tant qu’ils ne sont pas inscrits dans le marbre. Quand on a les moyens d’inscrire dans le marbre ce droit, alors on doit le faire», affirme-t-elle à France Info.

Long parcours législatif

Toutefois, pour qu’une proposition de loi constitutionnelle soit entérinée, le parcours est relativement long. Il faut dans un premier temps que l’Assemblée nationale et le Sénat votent dans les mêmes termes le texte présenté par le gouvernement. Puis dans un second temps qu’il soit soumis aux Français par référendum. Une étape toujours périlleuse pour un gouvernement. D’autant que, malgré l’apparent consensus sur cette question, les débats entourant cette consultation des citoyens offriraient une caisse de résonance aux discours anti-IVG, au risque de fragiliser ce droit essentiel.

Mais le gouvernement, pour éviter d’avoir à passer par un référendum, pourrait choisir de passer par un projet de loi constitutionnelle plutôt qu’une proposition. Seul un vote du Congrès (la réunion de l’Assemblée et du Sénat) aux trois cinquièmes permettrait alors de la promulguer. Et ainsi garantir aux 35 millions de femmes en France l’accès à ce droit précieux. Cependant, le porte-parole du gouvernement s’y est montré réticent ce mardi. «Je ne peux pas vous affirmer qu’il y aurait un projet de loi constitutionnel qui serait présenté et défendu. Il faut identifier une voix, fut-elle constitutionnelle. C’est à discuter», a-t-il déclaré au micro de France Inter.

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