« 52 % des décès » : CNews compare IVG et mortalité, la chaîne présente ses excuses et évoque « une erreur technique »

La chaîne d’information a comparé le nombre d’interruptions volontaires de grossesse avec le nombre de morts du cancer et du tabac. Plusieurs signalements ont été effectués auprès de l’Arcom. La chaîne a présenté ses excuses.

    L’IVG, « première cause de mortalité dans le monde » ? C’est ce qu’a laissé dire CNews, dimanche, comparant le nombre d’interruptions volontaires de grossesse au nombre de morts du cancer et du tabac. Cette séquence a été diffusée dans son émission « En quête d’esprit », consacré plus largement au sujet de l’avortement, alors qu’il sera discuté de l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution.

    La séquence a été diffusée dimanche, à la mi-journée, en direct. Après avoir évoqué que l’IVG était la « première cause de mortalité dans le monde », le présentateur de CNews Aymeric Pourbaix évoque le nombre de « 73 millions en 2022 » (sans évoquer de quoi il s’agit), « soit 52 % des décès ». L’infographie diffusée à l’écran au même moment liste « l’avortement » en tête des « causes de la mortalité dans le monde ».

    Ce passage, isolé et partagé sur les réseaux sociaux, n’est pas sans faire polémique. Et pour cause : de la sorte, CNews fait l’amalgame entre l’interruption volontaire de grossesse et la mort de personnes. « On ne parle pas des femmes qui pourraient mourir d’avortements clandestins, mais bien des embryons », dénonce Rose Lamy, derrière le compte Instagram @Preparez_vous_pour_la_bagarre.

    La classe politique a vivement réagi. « CNews toujours plus loin dans l’abject », a dénoncé la cheffe de file des députés insoumis Mathilde Panot sur X. « Pour rappel, le délit d’entrave à l’IVG est pénalement responsable condamné en France », a-t-elle continué, annonçant saisir l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) au nom du groupe insoumis à l’Assemblée nationale. Le sénateur communiste de Paris, Ian Brossat, avait plus tôt également annoncé saisir l’Arcom.

    Le député de la Vienne, président de la Commission des Lois, a également dénoncé ce passage. « Pour toutes celles et ceux qui se demandent pourquoi il faut constitutionnaliser pour définitivement protéger l’IVG. Voilà pourquoi ! » a réagi Sacha Houlié sur X. Et le député d’évoquer ainsi le débat actuel sur l’inscription dans la Constitution française de la liberté de femmes à recourir à l’IVG.

    La chaîne d’information, propriété du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, est très critiquée pour ses prises de position ou parti pris. Mi-février, le Conseil d’État a pressé l’Arcom de mieux contrôler la chaîne, l’incitant à « prendre en compte la diversité des courants de pensée et d’opinions représentés par l’ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs, animateurs et invités, et pas uniquement le temps d’intervention des personnalités politiques ». Contactée par Le Parisien, l’Arcom confirme avoir été saisie après cette nouvelle séquence. « Nous allons instruire la séquence qui nous a été signalée », précise-t-elle.

    Les excuses de la chaîne

    Le replay de l’émission n’était plus disponible ce lundi après-midi de CNews. Il était toutefois toujours disponible sur le site d’Europe 1, où l’émission est diffusée en simultanée, et sans image. En fin de journée, la chaîne a présenté ses excuses par la voix de Laurence Ferrari, mentionnant l’infographie (mais pas les propos du présentateur). « Ce sont des données incomparables, il est impossible de comparer ces chiffres et de les mettre en miroir de ceux de la mortalité liée aux cancers ou au tabac », a expliqué la présentatrice. « Il ne s’agit pour quiconque de remettre en cause » le droit à l’avortement, a-t-elle continué, réaffirmant les excuses de la chaîne.

    « À titre personnel, j’ajoute que cette loi est très importante pour moi et pour toutes les autres femmes », a aussi expliqué Laurence Ferrari, prenant position pour son inscription dans la Constitution. CNews « regrette la diffusion de l’infographie intitulée Les causes de la mortalité dans le monde dans l’émission En quête d’esprit diffusée le 25 février et présente ses excuses à toutes les personnes que cette infographie aurait pu heurter », a écrit CNews sur X.

    Quelques minutes plus tard, toujours sur X, c’est ensuite Gérald-Brice Viret, le directeur général de Canal + qui a présenté lui aussi ses excuses pour ce sujet. Ce dernier évoquant par ailleurs « une erreur technique », assurant que le passage incriminé « n’aurait jamais dû être diffusé ».