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#Metoo et #balancetonporc : les réseaux sociaux descendent dans la rue

Harcèlement sexuel, viols: la parole libérée?dossier
Le mouvement né sur les réseaux sociaux à la suite de l’affaire Weinstein va se concrétiser dans la rue. Un événement Facebook a été lancé pour organiser un rassemblement place de la République, à Paris, le 29 octobre.
par Marlène Thomas
publié le 18 octobre 2017 à 19h07
(mis à jour le 23 octobre 2017 à 15h48)

Dans le sillage de l’affaire Weinstein, une vague de témoignages de victimes de harcèlement ou d’agression sexuelles a déferlé sur les réseaux sociaux. Derrière les hashtags #MyHarveyWeinstein, #Balancetonporc ou encore #Metoo, des milliers de femmes ont brisé l’omerta. Plus de 150 000 messages, mobilisant plus de 59 000 internautes, ont été postés avec le mot-dièse #Balancetonporc, selon les chiffres de plateforme Visibrain, relayés par Le Figaro. Face à l’ampleur de la mobilisation, Carol Galand, 40 ans, a voulu porter le mouvement dans la rue. Mardi, elle a donc créé un événement Facebook «Metoo, dans la vraie vie» pour organiser un rassemblement place de la République, dimanche 29 octobre, à 15 heures. En une seule journée, déjà 2 700 internautes se disaient intéressés et plus de 460 affirmaient qu’ils y participeraient. Des personnes habitant trop loin pour s’y rendre ont même lancé des mouvements similaires dans d’autres villes comme LyonRennes, Montpellier, Marseille ou encore Pointe-à-Pitre en Guadeloupe.

«Je me suis dit que la manifestation était un bon moyen d'impliquer des personnes qui ne sont pas sur les réseaux sociaux. Je vais mettre des affiches dans les rues pour qu'elles soient au courant, explique Carol Galand. Mais surtout l'intérêt de ce rassemblement est d'avoir un «impact plus fort» : «On a l'habitude des buzz sur Facebook, Twitter et après chacun reprend son chemin et c'est oublié. Il y a des causes qui méritent qu'elles soient défendues un peu plus longtemps que trois jours avec un hashtag», lance l'organisatrice, qui a elle-même été victime de harcèlement sexuel. Un avis partagé par Julie (1), 30 ans, victime d'un viol : «Je compte participer à la manifestation, je suis très contente que la mobilisation en ligne prenne une forme plus concrète et arrive dans la rue. Je pense que nous en avons besoin parce que les outils en ligne sont limités et que demain, on risque de se remettre à poster des photos de chatons. Nous serons davantage visibles.»

«La honte doit changer de camp»

Dans la continuité de ce qui a été fait sur les réseaux sociaux, Carol Galand a émis l'idée que les victimes viennent munies d'un petit panneau précisant quand le harcèlement ou l'agression a eu lieu et qui était l'agresseur, sans toutefois le nommer. «Par exemple, dans mon cas cela donne : "C'était il y a 13 ans. C'était mon voisin. Je ne l'oublierai jamais. #Metoo". L'idée n'est pas de dénoncer quelqu'un en particulier, c'est juste d'exprimer un fait passé, qui est resté violent.» Un groupe de parole devrait aussi être mis en place sous la suggestion d'une participante. Les victimes souhaitant partager leurs histoires, les personnes qui ont envie d'en rassurer d'autres ou de donner des informations sur des associations seront les bienvenues.

Cependant, pour certaines femmes, passer la barrière protectrice du virtuel et témoigner à visage découvert reste difficile. «Les deux mobilisations sont nécessaires à mon sens. La parole en ligne est intéressante, elle permet à certaines femmes qui ne souhaitent pas être reconnues de le faire plus discrètement. Pour autant, la honte doit changer de camp et j'espère qu'on arrivera tous et toutes à affronter le regard des autres sur cette question. C'est tellement dur encore, même les institutions, censées nous protéger, ne nous écoutent pas», estime Julie.

Des alliés masculins

Si la majorité des personnes intéressées sont des femmes, quelques hommes comptent également se rendre à la manifestation. «J'appelle à manifester toutes les victimes et soutiens de victimes. Les hommes ont aussi besoin de trouver une place là-dedans et c'est aussi un moyen de les sensibiliser pour qu'ils puissent réagir», note Carol Galand. Alexandre Rousset, 27 ans, sera un des hommes présents, dimanche 29 octobre : «J'ai décidé de participer à cette initiative car la totalité des femmes de mon cercle privé qu'elles soient de ma famille ou des amies ont connu des situations plus ou moins violentes physiquement et moralement. En tant qu'homme, participer à cette manifestation permet de montrer son soutien. C'est une très bonne initiative car elle permet de faire prendre conscience aux femmes qui pensent que c'est normal que ça ne l'est pas et qu'elles n'ont pas à se victimiser elle-même.»

(1) Le prénom a été modifié.

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