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Harcèlement sexuel : non, nous ne « passerons pas à autre chose »

A ceux que le mouvement #metoo ennuie, la chroniqueuse de « La Matinale du Monde » Maïa Mazaurette répond : nous ne nous arrêterons pas.

Publié le 05 novembre 2017 à 06h41, modifié le 05 novembre 2017 à 17h10 Temps de Lecture 5 min.

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LE SEXE SELON MAÏA

Voici vingt-trois jours que vous entendez parler de #metoo, #moiaussi et #balancetonporc. Les révélations continuent, pas pour le plaisir, encore moins par goût pour le bavardage. Le mouvement s’étend parce que les femmes n’ont pas fini de parler, parce qu’il faut parfois du temps pour se décider, parce que nous nous étions habituées au confort du silence.

Nous n’avons pas fini le grand déballage et, pourtant, voici vingt-deux jours que certains demandent qu’on « passe à autre chose » – un exemple stupéfiant de « manterrupting », ce néologisme décrivant la manie qu’ont les hommes de constamment couper la parole aux femmes.

Tout d’abord, acclamons la redoutable capacité de concentration de nos interrupteurs contrariés : si un mouvement dure plus de quarante-huit heures, ils s’ennuient. Je sais bien que nous vivons dans une économie du manque d’attention, mais tout de même, bon courage quand il faudra lire Proust... ou aider son enfant de 7 ans à finir ses devoirs.

Ensuite, notons que seuls les sujets liés aux femmes sont priés de débarrasser le plancher – comme si l’affaire était réglée avant même qu’on ait pu la poser. Imaginez le même argument appliqué à l’économie ou à la politique ! Twitter bruisserait de commentaires du type : « Mais enfin, vous avez déjà parlé du chômage la semaine dernière, pourrait-on passer à autre chose ? » Ou en pleine Coupe du monde : « Il y a déjà eu quatre-vingt-dix minutes de football hier, vous n’allez quand même pas nous donner les résultats de tous les matchs ? »

Aveuglements sélectifs

Cette impatience révèle que, dans la tête des interrupteurs, les femmes restent les pom-pom girls de l’actualité. Elles sont décoratives, parfois divertissantes, mais elles servent d’amuse-bouche aux vrais sujets. L’information a sa grammaire, et le masculin est neutre.

Qu’on puisse ouvrir les journaux avec des histoires de bonnes femmes, quelle plaie ! Même harcelées, agressées et violées, nous ne serons jamais des victimes légitimes – je serais curieuse qu’on réserve le même sort aux victimes de terrorisme (« Que faisais-tu, attablé à cette terrasse, tu cherchais les ennuis, non ? Pourrait-on enfin parler d’autre chose que d’attentats, merci ? »).

Une expression récurrente consiste à vouloir « refermer la parenthèse ». Désolée de l’annoncer, mais le harcèlement n’est pas une parenthèse. C’est une constante. S’il fallait caser une parenthèse quelque part, elle concernerait nos aveuglements sélectifs. Cela donnerait quelque chose comme : « Au XXIe siècle, les femmes ont voulu écrire leur version des rapports de pouvoir et de sexe (et certains ont été dérangés parce qu’ils avaient piscine). »

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