On disait souvent de lui qu’il était le dernier des grands couturiers. La mode se remémore aujourd'hui Azzedine Alaïa, créateur de mode iconique, mort le 18 novembre 2017 à l’âge de 77 ans.

Un parcours pas si commun

C'est à Tunis que commence l'histoire d'amour entre Azzedine Alaïa et la mode. Le créateur tunisien né de parents aux origines espagnoles commence très jeune à s'intéresser à la couture et ment sur son âge afin de pouvoir intégrer l’École des beaux-arts de Tunis. Une fois sorti, il entame sa carrière en copiant, pour ses voisines, mais aussi des femmes des riches famille de Tunis, des modèles de robes signées Dior ou Balmain. Ses connivences avec les femmes le mèneront à Paris, en 1956, où il trouve une place chez Christian Dior. 

Mais son passage chez Dior, dont Yves Saint Laurent vient de prendre la tête, ne sera que de courte durée. La raison ? Alaïa est étranger et n'a pas les papiers nécessaires pour travailler au sein de la Maison française. C'est donc auprès de Guy Laroche d'abord et Thierry Mugler ensuite qu'il apprend les rudiments du métier de tailleur. 

Une formation qui le conduira rapidement à ouvrir son propre atelier rue Bellechasse, non sans l'aide de ses amies de bonnes familles à savoir Simone Zehrfuss et Louise de Vilmorin. La première lui trouve un atelier et la seconde l'introduit dans le monde fermé des familles parisiennes ce qui lui permet de se construire une clientèle très sélecte. 

Le style Alaïa

Thierry Mugler, désormais un ami, pousse alors Azzedine Alaïa a lancé sa propre marque. Les journalistes de mode saluent son travail, les Grands Magasins se pressent pour vendre ses pièces dans leurs rayons. Mais qu'est-ce qui caractérise le style Azzedine Alaïa ? 



Lignes sculpturales, matières seconde peau et coupes en biais sublimantes : le style si singulier d’Alaïa puise son essence dans une féminité ultra-fantasmée. Une démarche audacieuse qui lui permet de séduire une clientèle en vogue.

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Une histoire de femmes

Vous l'aurez compris, la mode par Azzedine Alaïa est une histoire de femmes. Des femmes qui l'ont suivies et soutenues tout au long de sa carrière. Car dès la création de son studio rue Bellachasse, il s'attire les faveurs du tout Paris qui comprend alors les actrices à la mode comme Arletty et Greta Garbo, les danseuses du Crazy Horse et Mathilde de Rothschild. Une clientèle éclectique qui définit bien le rapport qu'entretenait le couturier avec la mode. Une histoire de corps aussi diverses et variés puissent-ils être.

Dans les années 80, son appartement devient une pépinière de jeunes modèles qui ne tarderont pas à devenir des icônes de la mode de cette décennie et de la suivante. Veronica Webb, Naomi Campbell, Christy Turlington - qu'il est le premier à découvrir - ou encore Jerry Hall. Se joindront également à son clan d’amazones Farida Khelfa, Grace Jones, Stephanie Seymour ou encore Carla Bruni. Nombreuses sont celles qui acceptent de défiler pour lui non pas pour un salaire mais plutôt pour ses pièces de mode sculpturales. 

Un créateur en dehors du système

Mais si Azzedine Alaïa est aujourd'hui encensé par l'industrie de la mode il s'est pourtant joué d'elle tout au long de sa carrière. Le couturier au col Mao noir a préféré faire cavalier seul et présenter ses collection en dehors des Fashion Week officielles. Alors que dans les années 80 les designers présentent leurs défilés dans le faste et en font un spectacle, Monsieur Alaïa préfère lui organiser des défilés intimistes. Ce n’est d’ailleurs qu’en 2011 qu’il sera officiellement intégré au cercle très fermé des maisons de Haute Couture.

Admiré par ses pairs, il est décrit comme un travailleur acharné qui refuse de se prêter au grand jeu médiatique, préférant se consacrer à la finition de ses robes qu’aux interviews des journalistes. Une réputation qui lui vaudra une notoriété inégalée tout au long de sa carrière, sans avoir jamais investi dans une seule page de publicité. 

Suite au départ de John Galliano, on lui propose même de reprendre les rênes de la maison Dior. Il refuse, préférant tourner le dos au tourbillon vertigineux de la mode contemporaine. Finalement, c'est là que réside la force du label Alaïa. Par son talent et son envie de faire une mode qui défie le temps, Azzedine Alaïa a fait de sa marque une pierre blanche qui rappelle à chacun que la mode, avant d'être une histoire de tendances, est une question de passion.