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Quotas, malus, budget : le plan de Françoise Nyssen pour l’égalité femmes-hommes

La ministre se donne quatre ans pour tendre vers la parité dans le monde de la culture.

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Publié le 07 février 2018 à 15h52, modifié le 08 février 2018 à 08h57

Temps de Lecture 3 min.

La ministre de la culture Françoise Nyssen à Paris en octobre 2017.

La ministre de la culture, Françoise Nyssen, sort de sa réserve. Son discours prononcé lors du comité ministériel pour l’égalité entre les hommes et les femmes, mercredi 7 février, est, de l’avis général, inédit. La ministre se donne quatre ans, soit la fin du mandat d’Emmanuel Macron, en 2022, pour tendre vers la parité dans le monde de la culture, où les postes et les moyens de production sont très inégalement répartis.

Françoise Nyssen a ainsi martelé quelques chiffres, issus de l’Observatoire de l’égalité hommes-femmes dans la culture : « Moins d’un artiste sur quatre ­exposé dans un fonds régional d’art contemporain est une femme. Moins d’un long-métrage sur quatre agréé en France est réalisé par une femme. Moins d’un tiers des œuvres programmées dans nos théâtres publics sont signées par des femmes (…). On ne compte que trois femmes à la tête des dix-neuf centres chorégraphiques nationaux… »

Refusant « le fatalisme » ou la « passivité », Françoise Nyssen a brandi « le volontarisme » : « C’est la voie que je veux emprunter. J’assume le recours aux quotas de progression, aux objectifs chiffrés (…). Le secteur culturel a un devoir d’avant-garde », a-t-elle déclaré devant une assistance largement féminine, composée notamment de Véronique Cayla, patronne d’Arte France, Frédérique Bredin, présidente du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), etc.

Les 75 établissements publics culturels sont dirigés aux deux tiers par des hommes

Le ministère de la culture va devoir « donner l’exemple » et rattraper les inégalités salariales… de 10 % entre les hommes et les femmes, au sein de son personnel. Pour mettre fin à cet écart « inacceptable », Françoise Nyssen a dégagé une enveloppe de 500 000 euros, prise sur le budget de son ministère. La Rue de Valois a par ailleurs sollicité de nouveaux crédits auprès du ministère du budget afin de régler les disparités salariales, encore plus criantes dans les 75 établissements publics culturels (18 % d’écart).

Ces mêmes 75 établissements culturels (Opéra, Philharmonie…) sont dirigés aux deux tiers par des hommes – on ne compte que 26 femmes à la tête de ces vaisseaux souvent bien dotés. « Je souhaite que la parité devienne la règle, et que, d’ici à 2022, elle soit acquise », annonce la ministre. Mathématiquement, c’est simple : « Tous les mandats vont arriver à échéance dans les cinq ans à venir. Il y aura notamment 27 renouvellements cette année, 21 l’année prochaine, 18 celle d’après. Je souhaite que la moitié de ces renouvellements donnent lieu à la nomination d’une femme », a précisé Françoise Nyssen. Politiquement, ce sera sans doute une autre affaire, dans un milieu culturel plus conservateur qu’on ne l’imagine. « Françoise Nyssen, elle seule, aura la main sur ces nominations. Elle va donc pouvoir agir », assure une proche collaboratrice.

Féminisation des programmations

Dans les 351 lieux culturels labellisés (fonds régionaux d’art contemporain, scènes nationales…), les élus locaux auront leur mot à dire, en tant que cofinanceurs… « Je veillerai à ce que l’Etat porte la voix de la parité », a prévenu la ministre, qui n’exclut pas de prendre, le cas échéant, des « objectifs chiffrés, contraignants ».

Enfin, Françoise Nyssen veut s’attaquer aux programmations. Certes, celles-ci se féminisent, sous l’impulsion de groupes d’action, comme La Barbe ou les collectifs HF. Mais les progrès sont lents. Des taux de progression annuels vont être fixés : 10 % par an dans les lieux où la part des femmes programmées est inférieure à 25 %, 5 % par an là où les artistes femmes sont mieux représentées (entre 25 % et 40 % de la programmation). Un suivi pourrait être instauré « avec des conséquences directes sur les subventions : un système de malus pourrait être envisagé pour les labels qui ne respec­teraient pas leurs obligations », a conclu la ministre.

L’argent retiré aux uns doit être réaffecté à ceux qui jouent la carte de la féminisation

« Il faut reprendre la barre », a confié Françoise Nyssen au Monde, en quittant le comité ministériel. L’une des partici­pantes, Sophie Deschamps, ancienne présidente de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), se réjouit que des quotas soient enfin instaurés : « C’est une mesure que nous défendons depuis longtemps. Françoise Nyssen se montre plus volontariste que d’anciennes ministres. Mais il ne suffit pas de prévoir des malus, il faut donner des bonus aux lieux vertueux », explique-t-elle.

Autrement dit, l’argent retiré aux uns doit être réaffecté à ceux qui jouent la carte de la féminisation. Et, surtout, le temps passe vite : « Les programmations sont déjà prêtes pour la saison 2018-2019. Sont-elles paritaires ? », s’interroge Mme Deschamps. L’heure des travaux pratiques a sonné.

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