Des scientifiques ont pour la première fois réussi à cultiver des ovules humains en laboratoire jusqu'à leur pleine maturité, c'est-à-dire prêts à être fécondés, offrant ainsi une percée potentielle pour préserver la fertilité féminine, selon des travaux publiés le 9 février 2018. Une grande première soulignée dans un communiqué de l'Université d'Édimbourg (Grande-Bretagne) qui, avec des chercheurs de New York, a mené l'étude parue dans la revue Molecular Human Reproduction.
9 ovules matures obtenus hors du corps humain, une grande première
Des scientifiques avaient déjà réussi auparavant cette maturation en laboratoire avec des ovules de souris jusqu'à pouvoir produire des individus vivants. Chez l'humain, d'autres avaient fait mûrir des ovules à un stade de développement relativement tardif, mais jamais au stade de maturité nécessaire à la fécondation. Pour cette étude, les chercheurs ont donc mis au point des substances appropriées (appelés "milieux de culture") dans lesquelles les ovocytes ont été cultivés pour soutenir chaque étape de leur développement. Dix échantillons de tissus ovariens ont alors été prélevés chez des femmes âgées d'environ 30 ans et cultivés en 3 étapes pendant un total de 20 jours.
Sur les centaines de follicules (ovules immatures) de départ, seuls 9 ont atteint la maturité. Un résultat qui témoigne du travail qu'il reste à accomplir pour systématiser la démarche. Le professeur Azim Surani, de l'Université de Cambridge, estime ainsi auprès du Science Media Centre que bien que les résultats soient intéressants, "il reste beaucoup de travail avant de conclure qu'ils ont le potentiel d'être utilisés dans les cliniques". Il remarque également que "ces ovocytes sont plus petits que la normale" et pense qu'il pourrait être intéressant de tester leur développement en essayant la fécondation in vitro (FIV).
Une avancée porteuse d'espoir pour les femmes voulant procréer après une chimiothérapie
"Le fait de pouvoir développer pleinement des ovules humains en laboratoire pourrait élargir la portée des traitements de fertilité disponibles et nous travaillons maintenant à optimiser les conditions favorisant leur développement. Nous espérons également savoir, sous réserve d'approbation réglementaire, s'ils peuvent être fécondés", commente la professeure Evelyn Telfer, de l'Université d’Édimbourg, qui a dirigé cette recherche. Cette avancée, étape préalable à toute tentative de fécondation ultérieure, pourrait en effet avoir des applications pour préserver la fertilité de filles atteintes d'un cancer. L'intérêt, pour elles qui vont suivre un traitement comme la chimiothérapie, serait d'éviter la réimplantation de tissu ovarien préalablement prélevé, et ainsi le risque de réintroduire le cancer. À la place, les ovocytes immatures récupérés à partir d'un morceau d'ovaire des patientes pourraient être conduits à maturité en laboratoire et stockés pour être fécondés plus tard.
Pour le Dr Channa Jayasena, du Collège impérial de Londres, il s'agit là d'"un travail élégant, démontrant pour la première fois que les ovules humains peuvent être cultivés jusqu'à maturité dans un laboratoire". Il y voit "une percée importante, qui pourrait offrir de l'espoir aux femmes infertiles", mais "il faudra plusieurs années pour traduire cela en thérapie", prévient-il. Pour les auteurs de l'étude, des travaux supplémentaires seront nécessaires pour optimiser la procédure et déterminer si les ovules obtenus sont normaux et ont un potentiel de fécondation.