Lettre de la City. Parfois, l’évidence est devant nous mais on ne la voit plus. Alors – mea culpa – il a fallu qu’une banquière française me la pointe du doigt pour que la vérité apparaisse à ma vue : à la City, dans les rues, tout est organisé pour les hommes.
Les statistiques sont connues. Au Royaume-Uni, d’après le think tank New Financial, seuls 14 % des membres des comités de direction des sociétés financières sont des femmes (la France est à peu près au même niveau, à 16 %, contre 34 % en Scandinavie). Le bonnet d’âne revient au private equity (10 %) et aux hedge funds (11 %). Sous pression depuis quelques années, les conseils d’administration ont fait un effort, mais la proportion demeure de seulement 23 %.
Un relent de cadeaux achetés par ces messieurs
Mais nul besoin de faire de sérieux calculs statistiques pour le savoir. « Promenez-vous à la City : tous les magasins sont pour les hommes. Il n’y a que des coiffeurs pour hommes, des boutiques de complets, des vêtements pour hommes. Impossible d’y faire la moindre course », souligne cette banquière, qui tient à rester anonyme. Elle est arrivée à Londres il y a quatre ans, et la différence avec Paris lui a sauté aux yeux.
Petite démonstration, un mardi en fin de journée, au Royal Exchange, un ancien bâtiment reconverti en cafés et magasins, situé en face de la Banque d’Angleterre, au cœur de la City. Le défilé des vitrines est sans appel : un magasin de chaussures pour homme, un autre de lunettes avec un rayon pour femme quasi inexistant, un troisième de cosmétiques pour homme, un quatrième de sacoches en cuir…
Et quand les produits sont pour les femmes, il y a comme un relent de cadeaux achetés par ces messieurs sur le chemin du retour chez eux, avec beaucoup de bijoutiers. A l’intérieur du bâtiment, des collègues de bureau prennent un verre après le travail : à 18 heures, ce jour-là, on trouve quarante hommes et dix femmes.
A quelques rues de là, du côté de Moorgate, le constat est le même. Deux boutiques de complets pour homme sont côte à côte, chacune vantant sa promotion à 99 livres (112 euros) le costume. Quant au proche bookmaker, il est typiquement fréquenté par une clientèle masculine.
La garde des enfants hors de prix
Bien sûr, la City est un drôle d’endroit. Le quartier est millénaire, mais (presque) personne n’habite sur place et pas grand monde y fait ses courses. Les choses changent également. La mairie a beaucoup œuvré depuis une décennie pour faire revenir les commerces. L’exemple le plus frappant est One New Change, un centre commercial signé de l’architecte français Jean Nouvel, où l’on trouve des magasins parfaitement fournis pour les deux sexes.
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