Selon les travaux menés en Allemagne par une équipe internationale d'entomologistes, 76 à 82 % des insectes volants ont disparu depuis 1989. En cause, l'agriculture et l'utilisation des pesticides et engrais de synthèse. En raison de la similitude des modes d'exploitation, les mêmes résultats sont à craindre dans tous les pays européens, en particulier en France et au Royaume-Uni. 

Nous étions déjà sensibilisés à l’inquiétante baisse des populations d’abeilles dans le monde… Mais la situation est en réalité beaucoup plus grave. C’est tout le monde des insectes qui est en voie de disparition. Selon une étude publiée mercredi dans la revue Plos One, la biomasse des insectes volants a diminué de près de 80 % en Allemagne depuis 1989.
"Nos résultats documentent un déclin dramatique des insectes volants, de 76 % en moyenne et jusqu’à 82 % au milieu de l’été, dans les aires protégées allemandes, en seulement vingt-sept ans (…) Cela excède considérablement le déclin quantitatif, estimé à 58 %, des vertébrés sauvages depuis 1970", écrivent les auteurs. Leur travail a porté sur 63 réserves naturelles disséminées sur le territoire allemand.
Situation similaire en France
Selon les universitaires, le principal responsable de cette hécatombe serait l’agriculture et son emploi massif de pesticides et d’engrais de synthèse, une pratique qui touche bien au-delà des frontières de nos voisins d’Outre-Rhin. "La France ou le Royaume-Uni ont des systèmes agricoles très semblables et qui utilisent les mêmes intrants qu’en Allemagne. On ne peut pas l’affirmer, mais je dirais donc qu’il y a une bonne chance pour que l’Allemagne soit représentative d’une situation bien plus large. Si c’est effectivement le cas, alors nous sommes face à une catastrophe écologique imminente", alerte explique Dave Goulson, chercheur à l’université du Sussex au Royaume-Uni.
Ce sont les néonicotinoïdes, des neurotoxiques utilisés comme insecticides, qui sont particulièrement pointés du doigt. Dans sa loi biodiversité, la France en a décidé l’interdiction théorique à partir de 2018, mais des dérogations sont prévues jusqu’en 2020.
Bayer nie ce risque
En Allemagne, la société de gestion Union Investment "mène une campagne d’engagement auprès de Bayer, BASF et Syngenta au sujet des néonicotinoïdes (mais ces entreprises) ont répondu par la négative à la demande de reconnaître l’impact négatif de ces pesticides", rapporte une note Orange de Novethic sur les risques ESG des agro-industries.
Les insectes volants sont à l’origine de nombreuses chaînes écologiques. Ils pollinisent 80 % des plantes sauvages et entrent dans l’alimentation de 60 % des espèces d’oiseaux. "Alors que des écosystèmes entiers dépendent des insectes pour la nourriture et la pollinisation, on peut s’inquiéter d’un déclin des populations d’oiseaux et de mammifères qui s’en nourrissent", alerte Hans de Kroon, entomologie de l’université de Radboud aux Pays-Bas.

Ludovic Dupin, @LudovicDupin

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