Rencontre avec Mélanie Astles, voltigeuse hors pair

"Je suis partie de la Côte d’Azur, à 18 ans avec beaucoup de regrets. Grâce à l’étape Cannes Red Bull Air Race, j’y reviens 18 ans plus tard avec tous mes rêves accomplis !".

"Je suis partie de la Côte d’Azur, à 18 ans avec beaucoup de regrets. Grâce à l’étape Cannes Red Bull Air Race, j’y reviens 18 ans plus tard avec tous mes rêves accomplis !".

Paradou

Mélanie Astles, 35 ans, pratique la voltige et la course aérienne. Elle cumule les podiums, occupés jusque-là par les hommes. Elle est la première femme à participer aux championnats du monde Red Bull Air Race en classe Challenger

Quel est votre parcours ?
Mélanie Astles : Ma passion est née le jour où mon père m'a emmenée dans un meeting d'avion de chasse, à 7 ans. Pour payer mes heures de vol, j'ai bossé pendant sept ans dans des stations-service. Après mon diplôme de l'école de l'aviation civile, j'ai intégré l'équipe de France. Puis la team "Unlimited", le plus haut niveau. C'est une discipline super physique, très lourde pour les bras. Quand l'accélération atteint 10 G, le poids du corps est multiplié par 10 !

Les femmes résisteraient mieux aux G, une histoire de pression sanguine. Je concentre ma préparation physique sur l'explosivité pour que mes gestes soient rapides et précis. Effectuer par exemple une rotation complète à 400 km/h en moins d'une seconde. La technique est importante, mais tout autant le mental et la respiration. Quand je vole en m'amusant, en prenant du plaisir, je fais mes meilleurs temps. C'était le cas pour mon podium au circuit Indianapolis. Là-bas, on m'a raconté qu'on interdisait autrefois aux femmes d'approcher les stands, même d'embrasser leur mari au départ de la course !

Aujourd'hui, elles concourent mais gagnent aussi ! C'est la première fois depuis la création de ce circuit automobile en 1911 qu'une femme gagne. Ma passion m'a aidée à me fondre dans ce milieu macho mais aussi ma nature de guerrière.

Quels sont vos atouts ?
Mélanie Astles : Les encadrants apprécient mon sens de la sécurité. Si je ne sens pas quelque chose, je ne le fais pas. Il m'est arrivé par exemple de refuser un "run" d'entraînement parce que je m'étais pris un coup sur la tête avec le cockpit. En revanche, quand je suis dans la course, je suis là pour gagner ! Ils apprécient aussi ma gestion de la pression. J'aime même quand les situations se compliquent (météo difficile, problème technique…). Cette capacité d'adaptation me vient entre autres de mon expérience dans les stations-service. Après avoir été caissière puis adjointe, je me suis retrouvée gérante de remplacement. A 18 ans, j'ai quitté ma Côte d'Azur pour Rouen, Lyon, Montpellier… J'étais mutée selon les besoins et il fallait m'adapter dans la seconde.

Et maintenant ?
Mélanie Astles :
Je termine ma formation chez Air France à Paris pour devenir Officier Pilote de Ligne et piloter des moyens courriers sur Airbus A320. Là aussi, les femmes ne dépassent pas les 10% mais on a progressé depuis Danielle Decuré, première femme pilote de ligne*. C'est un sacré challenge car j'ai beaucoup de choses à apprendre, mais je m'éclate. Lundi dernier, je m'entraînais sur un simulateur à Roissy quand j'ai eu un flash. Il y a douze ans, j'étais à la même place avec un instructeur d'Air France. Il était convaincu qu'avec ma passion, je trouverais le moyen de percer. Et moi je le prenais pour un fou. Je n'avais pas de facilités scientifiques, pas le bac, pas 100 000€ et, en plus j'étais une femme ! Mes projets ? Intégrer le Master Class au Red Bull Air Race et piloter des longs courriers. J'y arriverai !

*Auteur de "Vous avez vu le pilote? C'est une femme" (éd Robert Laffont).