Bientôt un resto à Paris : la belle aventure du Reflet, resto tenu par des personnes trisomiques

par Sibylle LAURENT
Publié le 16 avril 2018 à 18h10
Bientôt un resto à Paris : la belle aventure du Reflet, resto tenu par des personnes trisomiques

PARTAGE - Il y a un peu plus d’un an, Le Reflet, un restaurant tenu par des personnes trisomiques a ouvert à Nantes, et cartonne. Un livre et un nouveau restaurant à Paris sont en préparation. Une cagnotte est ouverte en ligne.

Quand ça marche, il n’y a pas de raison de s’arrêter. Ça donne même envie de pousser encore plus loin. Et là, ça ne marche, pas, ça court, ça fonce, ça cartonne : à Nantes, un peu plus d’un an et demi après son ouverture, le restaurant le Reflet, qui a la particularité d’être tenu par des personnes trisomiques, connait un succès formidable. Il fait souvent salle comble midi et soir, au point qu’y débarquer sans réservation peut-être aventureux. Un succès qui donne des ailes et de nouveaux projets à son instigatrice, Flore Lelièvre : un livre et un restaurant à Paris sont en projets, et une cagnotte en ligne est lancée pour aider à financer le tout.

Derrière tout ça, une jeune femme, Flore Lelièvre, architecte designeuse de 27 ans, qui depuis quelques mois, a mis entre parenthèse son job pour permettre aux personnes trisomiques de travailler en "milieu ordinaire", mais aussi permettre à chacun d’aller à la rencontre de ces personnes "extra-ordinaires". Flore a un frère trisomique, a travaillé autour du handicap et son intégration dans la société. Et elle en est convaincue :  se mélanger, cela tire les personnes handicapées, et surtout, "elles ont aussi tellement de choses à nous apporter !"  Au Reflet à Nantes, six personnes trisomiques seront encadrées par un gérant et une cuisinière professionnels.

Equipe au top et supers retours clients

Et ça cartonne. "Pour dîner un samedi soir, il faut compter un bon mois", se réjouit Flore Lelièvre. "C’était ça le gros challenge : après le buzz médiatique, il fallait que les gens reviennent. Et on a une équipe au top, du coup les gens viennent et reviennent parce qu’ils passent un bon moment."   

Tous les objectifs fixés tombent les uns après les autres. Côté équipe, la plupart des employés, tous aujourd’hui en CDI, partaient de zéro en terme de restauration. "Être confronté aux clients leur a fait gagner en confiance, ils sont devenus plus assurés, ont gagné en autonomie", raconte Flore. "Ils grandissent tous. Certains ne se déplaçaient pas  avec les transports en commun et le font maintenant. La plupart, maintenant qu’ils ont un job, veulent avoir leur chez eux. Ils sont super épanouis."

Une petite clientèle d’habitués s’est créée. "On a des supers retours des clients, tant sur expérience culinaire que sur le temps qu’ils vivent", raconte Flore. "C’est une clientèle diverse et variée. On a aussi des gens qui viennent parce qu’on leur a dit que c’était bon, et ça, c’est super chouette !" Et réjouissance supplémentaire, ce restau est traité comme un autre : "Sur Tripadvisor, on a des supers commentaires ! Et à aucun moment les gens ne prononcent le mot handicap, donc les gens qui cherchent un restau viennent parce que ça a l’air bon, et en arrivant ils se disent, tiens c’est différent." Le Reflet est aussi entré cette année dans le Guide des tables de Nantes, qui répertorie les bonnes tables nantaises. "Le challenge était de devenir un restaurant comme les autres, et c’est une super belle récompense pour l’équipe, parce qu’on est jugé comme un restaurant." 

Il n’y a pas de recette magique, mais il faut le faire !
Flore Lelièvre

Ce succès foudroyant donne, forcément, envie de porter le message plus loin. Pour ça, deux autres projets, sont en route. Un livre, "Restaurants extraordinaires", va sortir en juin. Il raconte l’histoire du Reflet, comment l’établissement fonctionne, ce que cela a apporté aux clients, aux employés, aux voisines, et qui fait le tour d’horizon des initiatives similaires à travers le monde, à travers dessins, illustrations, témoignages, retours d’expériences. "L’objectif est de montrer que des personnes qui ont une trisomie 21 dans un restau, c’est possible", précise Flore. "Nous on l’a fait comme ça, d’autres le fond différemment, il y a plein de manière de le faire. Il n’y a pas de recette magique, mais il faut le faire !" Une cagnotte a été mise en ligne, qui se clôt dans 10 jours. Elle permettra aussi de financer le système de prise de commande adaptée dans le futur restaurant de Paris.

Car c’est ça, l’autre gros projet auquel s’attelle l’équipe du Reflet : un débarquement à Paris, avec un restaurant dans la capitale. "Ce futur restaurant, on le fait car on a envie dans la même démarche : monter au plus grand nombre que c’est possible de faire travailler des personnes trisomiques." Et forcément, s’installer dans capitale accroît le rayonnement et la visibilité du projet. Là encore, Flore Lelièvre mène les choses à fond de train. Le business plan est en train d’être bouclé, elle court partout présenter le projet, chercher des partenaires et des investisseurs, trouver un local, monter une équipe. "Le but est d’être hyper central, hyper accessible pour tous, dans un quartier qui bouge,  où l’on peut aller boire un verre le soir, avec la clientèle du midi et du soir." Et, tant qu’à se donner des défis compliqués, l’idée est d’ouvrir d’ici la fin d’année. "On est très optimiste !", sourit Flore.  

Et à Paris aussi, tout va vite, très vite, et les choses les plus folles arrivent. "En quelques allers-retours, on a déjà quasiment monté l’équipe. A Paris, une personne en fait rencontrer trois ou quatre autres", dit Flore. "C’est absolument excitant et terrifiant à la fois. Mais le projet fédère tellement c’est incroyable, on est hyper bien reçu !", raconte-t-elle.   La semaine dernière, elle a rencontré, rien que ça, le chef des cuisines de l’Elysée. "Il va nous faire la préface du livre", raconte Flore. "Il reçoit régulièrement des stagiaires en situation de handicap, on y est allé au culot, ça a marché. C’est génial. L’aventure du Reflet, c’est incroyable, ça fait rencontrer des personnes extraordinaires."

A Paris, il y a quelques semaines, un établissement du même type a ouvert. Il s’agit du Café Joyeux, premier coffee shop tenu par des personnes handicapées. Flore connaît, bien, elle est d’ailleurs en contact avec les fondateurs. "Nos projets partent de la même base, mais ils sont totalement différents ; on n’est pas sur le même type de restauration, on est vraiment complémentaires !", dit-elle. "De toute façon, il y a de la place et des candidats pour tout le monde à Paris." 

Bref, même si Paris, c’est une marche au-dessus pour un projet, des investissements plus importants, la jeune femme est confiante. Comme toujours. Convaincue de ce que les personnes handicapées peuvent apporter à la société, et inversement. "J’y crois à fond à cette rencontre", dit-elle. "A chaque fois qu’on a des gens qui  viennent au restau et qui ne sont pas sensibilisés au handicap, à chaque fois la rencontre se fait et ils ressortent de là en disant 'oh la la j’ai vraiment vécu un truc'." 

> Pour participer à la cagnotte sur Kisskissbanbank

> Le site internet du Reflet et pour suivre les aventures du Reflet sur Facebook


Sibylle LAURENT

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